Revue de presse

"Du patriotisme au compatriotisme" (F. Boudjahlat, huffingtonpost.fr , 28 av. 16)

par Fatiha Boudjahlat, secrétaire nationale à l’éducation du Mouvement républicain et citoyen. 29 avril 2016

"[...] L’Education qui se dit nationale doit assumer d’enseigner le patriotisme, parce que celui-ci s’apprend à condition qu’il s’enseigne. Et s’il s’enseigne partout, il permettra de forger une nation politique partageant un commun plutôt que ces particularismes qui ne sont plus folkloriques, linguistiques, mais de plus en plus religieux et ethniques. Il ne s’agit pas d’un bourrage de crâne, mais pourquoi ce qui va de soi dans tant de pays, dont la démocratie américaine, est criminalisée en France ? Comment susciter un sentiment d’appartenance à la Nation sans cet enseignement ? Le sentiment d’appartenance communautariste n’a pas nos pudeurs, les écoles confessionnelles font leur œuvre. Les mêmes gauchistes qui criminalisent et fustigent le patriotisme appellent à renforcer ce sentiment d’appartenance à une religion ou à un pays d’origine.

Il faut maintenant aller plus loin, ou ruser pour arriver à ce sentiment d’appartenance sur un commun plutôt que de laisser s’installer la singularité des particularismes. Il faut aller vers le compatriotisme. Etendre l’empathie que l’on ressent naturellement envers ceux qui nous ressemblent, par la couleur, la religion, l’origine, la proximité géographique, à ceux qui ne nous ressemblent pas. Cela vaut pour le Parti des Indigènes, réclamant des espaces de non-mixité- raciale, comme pour le FN. Reconnaître en l’autre, non pas ce frère universel, mais ce compatriote politique, égal en droits et en devoirs, dont la Nation nous rend responsable.

Ainsi, lui reconnaître l’exercice des libertés que l’on réclame, pas par faveur, mais parce que notre qualité de concitoyen nous oblige à dépasser nos reflexes communautaires grégaires pour forger un lien, un attachement à son pays mais aussi à tous ses habitants. Sans être dans la revendication de la singularité, on créé une société d’égaux, de sujets autonomes se reconnaissant libres.

Je ne veux pas une société de frères, avec le fond religieux que cela suppose. JL Mélenchon et Houria Bouteldja ont tous deux évoqué "l’amour" comme solution politique à tous les maux de la société française, y compris le terrorisme. C’est là une défaite du politique. C’est privilégier le sentiment et la séduction à la raison et au Droit. C’est encore introduire de la religiosité, puisque la définition première de l’amour est ce mouvement de dévotion vers un être idéalisé et sacré. On succombe en Amour, on séduit en Amour, on convainc en politique, on débat en politique. Et on quitte en Amour. Le lien national de plein droit est comme le lien familial de plein droit : il est inconditionnel. Il permet la divergence d’opinion, le pluralisme, l’opposition, quand l’Amour exige l’unanimité.

Reconnaître dans les autres nos compatriotes, c’est exiger d’abord de nous de remplir nos devoirs vis-à-vis d’eux. La participation au deuil national à la suite des attentats était donc impérative. Refuser de s’y associer, c’était s’exclure de la communauté nationale. C’était refuser la qualité de compatriote, de frère...en nation, aux victimes et s’interdire toute empathie à leur endroit et à celui de la Nation. Rien de bon, de juste, de sain ne pouvait le justifier.

Il y a des mots qu’il faudra de nouveau intégrer au logiciel politique. Ces mots devenus obsolètes ou sulfureux : patrie, patriotisme, allégeance, loyauté. Parce que des mots que l’on croyait obsolètes et sulfureux occupent les conversations et les esprits et se veulent modernes : race, ethnie, communauté, pudeur, apartheid. Retrouvons des mots politiques pour dire le commun politique. Soyons dans le compatriotisme."

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