(Charlie Hebdo, 19 juil. 23). Riss, directeur de "Charlie Hebdo". 19 juillet 2023
[Les éléments de la Revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]
Lire "Dieu sent le roussi".
Fin juin, un ressortissant irakien de 37 ans, qui avait fui son pays, a brûlé quelques pages du Coran devant la plus grande mosquée de Stockholm, dans le cadre d’un rassemblement autorisé par la police suédoise. Depuis, un autre individu avait demandé à agir de même avec la Torah et la Bible, mais bien qu’autorisé à le faire, il y renonça au dernier moment. Le pape François s’est offusqué de cette affaire dans ces termes : « Tout livre considéré comme sacré par ses auteurs doit être respecté, par respect pour ses croyants. […] Je suis indigné et dégoûté par ces actions. »
La phrase du pape vaut le détour. « Tout livre considéré comme sacré par ses auteurs… » Le pape connaît-il les rédacteurs de la Bible, connaît-il ceux qui ont écrit les évangiles ? L’Église elle-même est si peu sûre de leur identité qu’elle parle d’évangile « selon » Matthieu, « selon » Luc, « selon » Jean et « selon » Marc. Quant au Coran, connaît-on la main qui l’a écrit, sachant que Mahomet est considéré par les musulmans comme analphabète puisque seul Dieu en serait l’auteur ? La conclusion à laquelle on aboutirait, si on devait suivre le raisonnement du pape, serait celle-ci : si demain vous écrivez un livre sacré, alors personne n’aura le droit de le brûler, de le jeter à la poubelle ou de l’utiliser pour caler son lit, sans votre autorisation.
Le pape continue en affirmant que ce livre « doit être respecté, par respect pour ses croyants ». Selon le souverain pontife, le croyant serait donc un être humain d’une qualité morale, spirituelle et intellectuelle supérieure à ceux qui ne croient pas. Il instaure ainsi une hiérarchie entre croyants et non-croyants. Si vous vivez sans la Bible, sans la Torah ou sans le Coran, vos convictions sont bas de gamme à côté de celles, haut de gamme, des croyants. Ainsi en a décidé le pape.
Un acte de liberté
BFMTV rapporte les propos d’un témoin présent à Stockholm, un certain Noa Omran, artiste de 32 ans : « C’est fou, c’est absolument insensé, ce n’est que de la haine qui se cache derrière les concepts de démocratie et de liberté. » On touche là au cœur du problème : la démocratie et la liberté. C’est cela qui rend nerveux les religieux du monde entier, surtout ceux qui officient dans des régions où il n’y a ni démocratie ni liberté, comme au Moyen-Orient. Car le statut social flatteur que leur confère leur religion n’a rien à gagner dans un système politique démocratique. Bien au contraire, dans ce type de régime, ils devront supporter de voir leurs dogmes, leur rôle et leur influence remis en cause par différentes formes de contestations permises par la liberté d’expression.
Si on en croit cette personne interviewée, la haine serait du côté des brûleurs de Coran ou de Bible. Jamais du côté de ceux qui menacent ou tuent en leur nom ? Voir brûler des livres n’a jamais été très rassurant. Mais ces textes n’ont pas été écrits par des romanciers, des philosophes, des universitaires ou des hommes politiques. Ces ouvrages sont des règlements intérieurs rédigés pour encadrer et contrôler les individus. Les brûler est un acte de liberté pour s’affranchir de leur emprise sur les esprits, pour se libérer du carcan qu’ils cherchent à installer sur nos consciences en affirmant arbitrairement ce qui est bien et ce qui est mal. [...]"
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