Revue de presse

"De « l’affaire du foulard » à Conflans, comment l’islamisme a infiltré l’école" (lopinion.fr , 19 oct. 20)

31 octobre 2020

[Les articles de la revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

"Les défenseurs de la laïcité décrivent une institution perméable aux offensives radicalistes

Marie-Amélie Lombard-Latune

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« Les fonctionnaires de l’Education nationale qui enseignent la laïcité sont en guerre ouverte contre les familles musulmanes. Il y a donc une obligation de combattre et tuer de toutes les manières légiférées ces ennemis d’Allah ». N° 7 de la revue Dar al-Islam de l’Etat islamique, titrée « La France à genoux », décembre 2015. Pour ceux qui ne prenaient pas les menaces de Daech pour de lointaines élucubrations agitées au Levant, le scénario de l’attentat de Conflans-Sainte-Honorine a commencé à s’écrire il y a cinq ans, voire bien avant. Cette propagande islamiste pousse-au-crime s’est répandue à l’école comme partout où elle ne s’est pas heurtée à une riposte immédiate et ferme ; elle a imprégné des consciences qui, par naïveté, par culture de l’excuse, ont minimisé le danger.

« Pourtant, on sentait que cela allait arriver », affirme l’ancien inspecteur de l’Éducation nationale Jean-Pierre Obin, auteur du livre Comment on a laissé l’islamisme pénétrer l’école (Hermann, 2020). Dès 2004, il alertait sur ces dérives et n’est donc pas un Cassandre de la dernière heure. « Toute cette littérature islamiste est très bien faite pour qui veut y adhérer, poursuit-il. Elle emprunte à la rhétorique nazie en dénonçant une “laïcité, invention judéo-maçonnique” » et elle se diffuse sous le manteau dans les quartiers à forte communauté musulmane, sous la forme d’opuscules imprimés en Arabie saoudite et traduits en français. Le principal d’un collège de Marseille m’a dit qu’il en avait retrouvé sur ses élèves ». Selon le journaliste Mohamed Sifaoui, dans les librairies dites « islamiques » qui se sont multipliées dans les banlieues, « 80 % de la littérature vendue est en fait islamiste ».

Cette poussée fondamentaliste, « c’est ce qu’on rabâche depuis des années, soupire Gilles Clavreul, ancien délégué interministériel à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme et fondateur du Printemps républicain, mais on nous oppose toujours le même discours : “Il faut relativiser”, “il y a plus important”, “ces incidents sont gérés”… ». Une tendance au « pas de vague » que le ministre Jean-Michel Blanquer, avec son dispositif pour la défense des valeurs de la République, tente d’enrayer.

Accommodation. Les atteintes à la laïcité dans l’Education nationale – 935 faits entre septembre 2019 et mars 2020 – sont en légère baisse, mais en progression à l’école primaire, et divisées en cinq catégories : tenues ou signes ostentatoires (20 %), refus d’une activité scolaire (16 %), contestation d’un enseignement (13 %), prosélytisme (11 %) et autres (40 %). Six académies regroupent 60 % des signalements. Deux interprétations peuvent être données à ces chiffres : ils sont faibles rapportés aux 12 millions d’élèves, ou ils ne reflètent pas totalement la réalité. C’est cette dernière analyse que livrent les experts « laïcité » de l’Education nationale : « Les personnels s’habituent et finissent par s’en accommoder », les dénoncer est souvent assimilé « à de la délation ou de l’islamophobie ».

La lente dégradation au sein de l’Education nationale, née dans le sillage de « l’affaire du foulard de Creil » à la fin des années 1980, s’est singulièrement accélérée, notamment après le succès des « journées de retrait » dans les milieux musulmans (appel au boycott de l’école lancé en 2014 en raison de la diffusion présumée de la théorie du genre). A l’époque, la carte des retraits massifs se superpose avec celle des mosquées intégristes. La campagne anti-Education nationale libère un flot de critiques sur les programmes scolaires en général. « On assiste même désormais à une compétition dans les banlieues entre salafistes et évangéliques, relate Jean-Louis Auduc, membre du Conseil des sages de la laïcité créé par le ministre de l’Education. Chez ces derniers, très présents parmi les communautés originaires d’Afrique subsaharienne ou des Antilles, un enfant peut être considéré comme nubile dès 7 ans. En face, leurs concurrents promeuvent alors le ramadan dès l’école primaire. Cette compétition est une vraie grille de lecture. »

A partir de 2015, le « droit de ne pas être Charlie » se diffuse dans le milieu enseignant , propagé par la Ligue de l’enseignement, des syndicats, certaines associations de parents d’élèves. « Ces gens-là mélangent tout : le sort des musulmans dans le monde, Zemmour à la télé, les banlieues ghettos… », constate Gilles Clavreul. « La posture est systématiquement victimaire, ajoute Jean-Louis Auduc. On parle trop de la Shoah mais pas assez des Palestiniens… Evoquer le génocide arménien est aujourd’hui ce qui provoque le plus de contestations à l’école. Les milieux turcophones, la sphère du Croissant turc, sont très actifs au sein de la mouvance islamiste ».

Bagage intellectuel. Après vingt et un ans d’enseignement dans un collège de Seine-Saint-Denis, Iannis Roder note, non pas une montée de l’islam radical, mais « une emprise toujours plus forte de la religion comme élément structurant de l’identité des élèves ». Exemple, ce voyage scolaire au Futuroscope et les 40 cuisses de poulet pour le pique-nique, non certifiées halal, qu’il a dû jeter. « Cela ne serait pas arrivé il y a dix ans, pas plus que ces refus d’assister aux cours de musique pendant le ramadan ».

Face à ces offensives contre la laïcité, les enseignants sont peu armés. Par manque de formation mais, surtout, par manque de lucidité face aux enjeux. « C’est la génération indignée, pointe Iannis Roder. Avant, on avait des collègues solides sur leur bagage intellectuel. Aujourd’hui, on est dans la compassion et la culpabilité mal placée ». Et l’autocensure, pour 37 % des enseignants, par « peur des accidents » (jusqu’à 54 % en zone d’éducation prioritaire), d’après un sondage de l’Ifop. Selon les chiffres de Jean-Pierre Obin, seuls 6 % des enseignants ont reçu une formation à la laïcité. D’où leur malaise lorsque leur enseignement est contesté. D’où les multiples précautions avant d’engager un débat. D’où sans doute l’attitude du professeur d’histoire-géo de Conflans-Sainte-Honorine, Samuel Paty, demandant à ses élèves de fermer les yeux ou de quitter la classe – les faits ne sont pas encore bien établis – avant de montrer les caricatures de Mahomet.

« L’islamo-gauchisme est majoritaire en salle des profs, accuse Jean-Pierre Obin, tout comme à la FCPE », la première association de parents d’élèves du public. Des familles sont, elles, « clairement tombées sous la coupe des islamistes », s’alarme Jean-Louis Auduc en référence aux vidéos postées sur Facebook traitant le professeur d’histoire de « voyou ». Ce sont ces parents d’élèves qui, pour lui « ont armé le bras du terroriste » à Conflans."

Lire "De « l’affaire du foulard » à Conflans, comment l’islamisme a infiltré l’école".


Voir aussi dans la Revue de presse les rubriques Atteintes à la laïcité à l’école publique, "Etat islamique", "Daech" : propagande dans Terrorisme islamiste (note du CLR).


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