Comité Laïcité République - La laïcité n’est pas une opinion, c’est la liberté d’en avoir une

"[...] Fin janvier pourtant, M6 diffuse un reportage sur le développement de l’islam radical en France et notamment à Roubaix (Nord). Sont exposés : écoles illégales dissimulées, fillettes de 7 ans voilées, mosquées radicales à l’enseignement ultra-conservateur… Des pratiques qui relèvent d’une dérive désormais connue : le fréro-salafisme. Mais pour la France insoumise, qui bat alors le pavé de la campagne présidentielle, ce reportage, immédiatement étiqueté « islamophobe », s’inscrit plutôt dans l’agenda raciste de l’extrême droite.

En première ligne pour couvrir d’anathèmes le travail des réalisateurs : David Guiraud, qui s’émeut sur son compte Twitter du « journalisme de caniveau » de M6. Selon lui, les enquêteurs sont des « obsessionnels » qui se trompent de combat : le problème, à Roubaix, n’a rien à voir avec l’expansion de l’islam fréro-salafiste mais uniquement de la précarité. « Ce reportage est une diversion », concluait-il. À Marianne, il persiste et signe : « Vous y êtes allé, vous, rue de Lannoy [dont des commerces sont mis en cause dans l’émission, N.D.L.R. ] ? Ce reportage est mensonger, l’analyse qui y est développée est fausse. Le sujet rue de Lannoy, ce n’est pas le fondamentalisme, c’est le social, et je refuserai d’avoir un débat sur ces bases-là. »

David Guiraud a largement participé à l’anti-service-après-vente du documentaire sur les plateaux télé. Il aiguise ses répliques et tire… dans tous les sens : « Il y a aujourd’hui un amalgame qui est fait entre islamisme et terrorisme », ose-t-il, doctement, sur CNews. Une déclaration qu’il assume, confirme-t-il à Marianne. Certes, tous les islamistes ne sont pas des terroristes, mais la politisation d’un islam radical pose, à la société française, d’autres problèmes que les tueries de masse – séparatisme culturel, revendications religieuses à l’école, voilement des fillettes… « Elles sont où ces fillettes voilées ?, nous lance-t-il. Vous les voyez où ? C’est très marginal. Selon un rapport du "Centre pour la prévention contre les radicalités sociales" à Roubaix et Maubeuge, le salafisme et les pratiques très fondamentalistes sont mal transmis en France. Elles sont en recul. Ça ne fait pas rêver les gamins de se réveiller à 6 heures du matin pour faire la prière », estime-t-il.

En réaction au reportage de M6, David Guiraud organise, le 11 février, une réunion publique où des commerçants de la rue de Lannoy ont été invités à s’exprimer sur leur quotidien. Les intervenants s’interrogent sur la meilleure manière de « lutter contre l’extrême-droitisation des médias ». Rien, en revanche, sur l’expansion d’un islam ultra-rigoriste dans le quartier. « Ce ne sont pas des fondamentalistes, assure-t-il. Une commerçante a dû fermer son commerce après ça. Voilà les conséquences sociales de ce type d’accusations ! »

L’Insoumis savait-il déjà, alors, qu’il serait candidat à Roubaix pour les législatives ? « C’est décidé depuis novembre », nous confie-t-il, assumant parfaitement d’être monté au créneau pour défendre Roubaix et la rue de Lannoy. Cette ligne politique, consistant à parler du social, mais à ne pas considérer le fondamentalisme comme un problème politique est plus ancienne encore. « Ce n’est pas un opportuniste, plutôt quelqu’un de convaincu des thèses américaines dites progressistes », explique à Marianne George Kuzmanovic, ancien cadre de La France insoumise, aujourd’hui président de République Souveraine, un parti souverainiste, social et laïque. « Quand j’étais à la France insoumise, il n’était pas vraiment audible. C’est quand la ligne sur la laïcité et les sujets républicains a changé qu’il l’est devenu. »

Pardonnez mon silence. J’ai vécu un enchaînement de moments douloureux. J’ai vu une campagne raciste abominable dévorer Taha. Puis il a été accusé par des femmes. La priorité est donc de les écouter et d’établir la vérité.

Pour ma part, je repars au combat.

— David Guiraud (@GuiraudInd) May 13, 2022

Les sujets sur lesquels David Guiraud est le plus féroce sont pourtant bien ceux de la gauche américaine : immigration, identité, islam. « Ce sont des images miroirs d’Éric Zemmour. Il faut faire l’inverse de ce qu’il fait, jusqu’à la caricature parfois. Un modèle anglo-saxon, très communautariste », tranche Georges Kuzmanovic.

Et féministe ? Pendant la crise qu’a traversée LFI mi-mai, après que Taha Bouhafs, militant LFI très populaire pressenti pour être le candidat à Vénissieux, a été accusé de violences sexuelles, David Guiraud est resté silencieux. Quelques jours après la révélation du scandale, il se fend finalement d’un tweet : « Pardonnez mon silence. J’ai vécu un enchaînement de moments douloureux. J’ai vu une campagne raciste abominable dévorer Taha. Puis il a été accusé par des femmes. La priorité est donc de les écouter et d’établir la vérité. » Pas vraiment sur la ligne féministe du « On te croit », en somme. « En politique, Taha est mon meilleur pote, je ne ferai pas de commentaire. », balaie-t-il aujourd’hui pudiquement.

« La première fois que j’ai rencontré David Guiraud, raconte notre source anonyme, c’était en 2017. Après l’élection présidentielle, Éric Coquerel avait mis en place un groupe de travail sur les quartiers populaires, là où, pensaient-ils, ils pourraient récupérer les 600 000 voix qui ont manqué au leader insoumis pour franchir le premier tour. » Dans ce groupe de travail, on trouve David Guiraud, devenu attaché parlementaire du député Coquerel, et Taha Bouhafs. « J’ai assez vite compris que tout avait déjà été décidé, ils souhaitaient s’allier au comité Adama, aucune discussion possible. »

Un peu plus tard, une seconde réunion a lieu, en banlieue parisienne, à laquelle notre source assiste également : « Ce beau petit monde était là pour dire tout le mal qu’ils pensaient de la police et de la République. C’est là que je me suis vraiment rendu compte d’à quel point tous ces gens étaient devenus indigénistes. » [...]"

Lire "David Guiraud, le candidat insoumis qui "clashe" à tout va… sauf l’islam radical".