Revue de presse

"Contre le racisme, l’Assemblée supprime le mot « race » de la loi" (rue89.com , 17 mai 13)

17 mai 2013

"Faire disparaître le mot « race » de nos lois : c’est l’objectif du texte adopté jeudi soir par l’Assemblée nationale. Mais il reste encore à le faire disparaître de la Constitution... comme François Hollande s’était engagé à le faire dès le « lendemain de la présidentielle ».

1 Pourquoi faire disparaître le mot « race » de la loi ?

Il fallait « mettre un terme à [une] incohérence », selon les auteurs de la proposition de loi, le communiste André Chassaigne et Marc Dolez (ancien membre du Parti de gauche) :

« [...] La “race” constitue une catégorie juridique, alors que l’ensemble de notre législation vise à combattre le racisme [...].

Il convient [...] de supprimer de nos textes le mot “race”, qui n’a pas de valeur scientifique et sur lequel les idéologies racistes fondent leur conviction [...]. »

La « race » est apparue pour la première fois dans notre législation en avril 1939. Un décret-loi du Garde des sceaux Paul Marchandeau prévoyait des sanctions :

« [...] Lorsque la diffamation ou l’injure, commise envers un groupe de personnes appartenant, par leur origine, à une race ou à une religion déterminée, aura eu pour but d’exciter à la haine entre les citoyens ou les habitants. »

Ce décret-loi sera abrogé l’année suivante par le régime de Vichy. Qui réintroduira le mot « race » dans la loi – dans un but opposé, puisqu’il sert de fondement aux lois antisémites.

Après la guerre, le mot « race » réapparaît dans la législation – et il est même introduit dans le préambule de la Constitution en 1946. Cette fois, dans le but de combattre le racisme.

2 Combien y a-t-il de références à la « race » dans nos lois ?

Selon le rapport de la commission des Lois, le nom commun « race » et l’adjectif « racial » apparaissent à 59 fois dans la législation française. Et ce, dans les domaines les plus variés, du droit pénal au droit du travail, en passant par celui du sport.

Ces références visent chacune à réprimer, justement, le racisme. Comme dans cette formule revenant régulièrement dans les codes et lois en vigueur, prévoyant de punir une infraction (ou de renforcer la peine déjà prévue) dans cette circonstance :

« [...] Lorsqu’elle est commise à raison de l’appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, de la victime à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée. »

C’est sans surprise dans le code pénal que le mot revient le plus souvent, afin d’alourdir les peines déjà prévues ou pour détailler la définition du génocide ou du crime contre l’humanité.

Les références à la « race » ne manquent pas dans les autres domaines législatifs. Voici quelques exemples :

  • dans le code du sport, l’article 332-18 prévoit la dissolution d’associations de supporters lorsque ceux-ci se livrent à des actes « de dégradations de biens, de violence sur des personnes ou d’incitation à la haine » à caractère raciste ;
  • dans la loi destinée à « améliorer les rapports locatifs », votée en 1989, l’article 1 précise qu’« aucune personne ne peut se voir refuser la location d’un logement » en raison (entre autres) de sa « race » ;
  • dans la loi Informatique et libertés de 1978, l’article 8 interdit « de collecter ou de traiter des données à caractère personnel qui font apparaître, directement ou indirectement, les origines raciales [...]. »

Le texte voté jeudi soir supprime donc le mot « race », remplace l’adjectif « racial » par « raciste » ou le fait précéder par l’adverbe « prétendument » : dans ce cas, la loi ne punira plus des discriminations basées sur les « origines raciales », mais sur les « origines prétendument raciales ».

3 Mais pourquoi la Constitution continue-t-elle à parler de « race » ?

Si la proposition de loi est adoptée par le Sénat et promulguée, il restera tout de même une référence à la « race » dans le texte suprême : la Constitution. Ce qui peut évidemment surprendre.

C’est le racisme et l’antisémitisme de Vichy qui a conduit à introduire la « race » dans le préambule de la Constitution de 1946. Et cette référence a été reprise par la Constitution de 1958. Son article premier explique :

« La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion [...]. »

Supprimer cette dernière réference à la « race » nécessitera donc une révision de la Constitution. C’était justement une des promesses de campagne de François Hollande.

Le 10 mars 2012, dans un discours consacré à l’outre-mer, le futur président prenait cet engagement :

« Il n’y a pas de place dans la République pour la race. Et c’est pourquoi je demanderai au lendemain de la présidentielle au Parlement de supprimer le mot “race” de notre Constitution. »

Un an après la présidentielle, François Hollande n’a pas encore tenu sa promesse. La proposition de loi adoptée jeudi soir par l’Assemblée lui montre la voie..."

Lire "Contre le racisme, l’Assemblée supprime le mot « race » de la loi".


Lire aussi le communiqué du CLR La "race" enfin chassée de la Constitution ? (11 mars 12) (note du CLR).


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