(Le Figaro, 28-29 sept. 24) 29 septembre 2024
[Les éléments de la Revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]
Lire "Conseil d’État : l’abaya définitivement hors la loi de l’école".
Confirmant l’interdiction du port de ce vêtement religieux, les sages ont écarté l’argument fondé sur le droit au respect de la vie privée.
Gravés dans la jurisprudence du Conseil d’État, l’abaya et le qamis sont désormais hors la loi scolaire. Un an après la décision de Gabriel Attal - alors ministre de l’Éducation nationale - d’interdire ces deux tenues au nom de la laïcité, voilà le débat juridique définitivement soldé. Il confirme la précédente décision de référé. Le recours avait été formé par les syndicats La Voix lycéenne et SUD-éducation et les associations Le poing levé et Action droits des musulmans.
Ces quatre requérants demandaient l’annulation pour « excès de pouvoir » de « la note de service du 31 août 2023 du ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse intitulée “Principe de laïcité à l’Ecole-Respect des valeurs de la République” ». Ils demandaient également : « l’interdiction d’un vêtement au sein des établissements scolaires par une note de service peut-elle être considérée comme une ingérence “prévue par la loi” au sens de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ? »
Dans sa décision de référé, le juge administratif suprême s’était contenté, dans un argumentaire lapidaire, de rappeler les termes de l’article 1er de la loi du 15 mars 2004 et de l’article L. 141-5-1 du code de l’éducation nationale : seuls sont autorisés « les signes religieux discrets ». Et de constater que ces deux vêtements ne l’étaient apparemment pas.
« Non, la laïcité n’est pas négociable »
Dans sa décision au fond du vendredi 27 septembre, Le Conseil d’État va plus loin. Pour débouter les requérants, il rappelle que sont « interdits, d’une part, les signes ou tenues, tels notamment un voile ou un foulard islamique, une kippa ou une grande croix, dont le port, par lui-même, manifeste ostensiblement une appartenance religieuse, d’autre part, ceux dont le port ne manifeste ostensiblement une appartenance religieuse qu’en raison du comportement de l’élève ». Il s’agit « de protéger l’élève de tout comportement prosélyte ». C’est là « un principe cardinal, protecteur de la liberté de conscience ».
Or les juges administratifs notent une très forte augmentation « des signalements au cours de l’année scolaire 2022-2023, 4 710 (signalements, NDLR) ayant été recensés, contre respectivement 2 167 et 2 226 les deux années scolaires précédentes » et que « la majorité de ces signalements, (…) concernait le port de tenues de type abaya ». Et d’insister sur le fait qu’ « au cours du dialogue engagé avec les élèves faisant le choix de les porter, les discours étaient en grande partie stéréotypés, inspirés d’argumentaires diffusés sur des réseaux sociaux et élaborés pour contourner l’interdiction énoncée par ces dispositions ». De quoi prouver pour le Conseil d’État, l’aspect ostentatoire et prosélyte de ces vêtements.
Pas d’interdiction disproportionnée
Les sages du Palais royal répondent par ailleurs à un nouveau « moyen » jamais soulevé jusque-là par les défenseurs de l’islam radical. Ils invoquent en effet l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales qui scelle le droit au respect de la vie privée et familiale. Jusque-là, les juges avaient toujours brandi son article 9 sur la liberté d’expression. À supposer que l’interdiction de porter ces vêtements soit « constitutive d’une restriction suffisamment significative de cette liberté pour être regardée comme une ingérence dans l’exercice du droit de ces élèves au respect de leur vie privée », ils rappellent aussi que ce même article a notamment pour but « la protection des droits et libertés d’autrui ».
Transcrit en droit de l’école, ce principe n’est rien d’autre que « la garantie pour les élèves de bénéficier d’un enseignement public exempt de toute forme d’exclusion et de pression, dans le respect du pluralisme et de la liberté d’autrui ». Or le caractère ostensible de ces vêtements, l’échec du dialogue avec les élèves concernés comme l’existence d’« autres modalités d’accès à l’instruction obligatoire prévues », ne rendent pas l’interdiction de l’éducation nationale disproportionnée par rapport au principe fondamental défendu par cet article 8. De quoi donc écarter ce dernier.
Sur Twitter Gabriel Attal, ex-ministre de l’Éducation nationale, a commenté : « Non, la laïcité n’est pas négociable. Oui, la laïcité est un combat de tous les instants, qui doit être mené sans relâche, sans faiblesse et sans compromission ».
Voir aussi dans la Revue de presse le dossier Voile, signes religieux à l’école dans Atteintes à la laïcité à l’école publique dans la rubrique Ecole,
dans les Documents le dossier Signes religieux à l’école (note de la rédaction CLR).
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