Culture / Cinéma

Chers camarades - Le vrai visage du régime krouchtchevien (G. Durand)

par Gérard Durand. 13 septembre 2021

[Les échos "Culture" sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

Chers camarades, d’Andrey Konchalovsky (2 h), avec Youlia Vysososkaya, Vladislav Komarov. Sorti le 1er sept. 21.

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Konchalowsky est russe et il aime peindre la Russie, pas celle des cercles officiels mais celles de la vie quotidienne du peuple et elle n’est pas toujours rose. De l’URSS à Poutine, le peuple russe est à l’épreuve et la peinture réaliste de ses films - il en a réalisé 25 - déplait parfois au pouvoir. Chers camarades est son dernier film proposé dans les salles européennes, on peut en voir d’autres dans certaines salles d’art et d’essai ou dans les ciné-clubs.

L’histoire se passe dans une ville moyenne à l’époque de Krouchtchev. C’est une ville industrielle entourée d’usines dont l’une des plus importantes est une usine ferroviaire. Depuis quelques semaines, les pénuries alimentaires se multiplient, avec leurs corolaires de hausses de prix et de marché noir. Les autorités adoptent un discours lénifiant, appuyé sur le fait qu’il ne s’agit que d’une difficulté temporaire, un moment difficile a passer. Mais il prend difficilement, et des grondements se multiplient.

Ludmila est une communiste convaincue, elle est cadre du parti et travaille dans l’un des comités municipaux. Elle n’imagine pas un instant que les travailleurs puissent se révolter dans le pays du socialisme. Son discours est particulièrement violent contre ceux qui ne peuvent être que des meneurs agissant contre le peuple.

Le grain de sable sera la décision du directeur de l’usine ferroviaire de diminuer les salaires de 30% sans aucune discussion. Les ouvriers se prononcent pour la grève. Parmi eux, la fille de Ludmila. La grève a bien lieu et sera réprimée dans des conditions aussi féroces qu’obscures.

Dans l’affolement, la fille de Ludmila disparaît et notre héroïne part à sa recherche. C’est en suivant cette quête et ses péripéties que le spectateur va découvrir le vrai visage du régime krouchtchevien.

Le récit est très bien construit et les interprètes formidables. Il met en avant deux aspects du paysage politique de cette époque. Le premier est la férocité du régime et de ses organes parallèles (le KGB) agissant parfois à contre-courant du pouvoir. Le second, plus inattendu, est la nostalgie stalinienne. L’on voit à plusieurs reprises des personnages regretter que Staline ne soit plus là, car il n’aurait rien toléré de tout cela. « Avec Staline, les prix baissaient », nous rappelant le livre de Svetlana Alexievitch La fin de l’homme rouge.

Ce film est à voir comme un témoignage, et la critique comme les spectateurs ne s’y sont pas trompés en lui donnant des notes de très bon niveau.

Gérard Durand


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