Philosophe, universitaire. 17 mars 2015
La double menace du populisme qui prend la Nation en otage et du communautarisme qui étouffe les personnes, et d’abord les femmes, doit pousser les citoyens laïques à agir. N’oublions pas que les journalistes de Charlie hebdo n’aimaient guère les laïques « mous » ou se complaisant dans le déni.
Sachons faire nôtre l’avertissement de Lydia Guirous : « Le principe de laïcité est l’un des principes républicains les plus importants. C’est une digue… mais qui risque aujourd’hui de céder. Cessons cette fuite en avant et réaffirmons notre attachement à la France, à son identité héritée des Lumières et soyons à la hauteur des pères fondateurs de la République. »
Cette voix retrouve la force des Lumières et notamment celle d’un Montesquieu qui prévient, lui aussi, que quand les Républiques doutent d’elles-mêmes, le fanatisme religieux peut ressurgir : « le mal est venu de cette idée qu’il faut venger la divinité (…) (or) il faut honorer la divinité et ne la venger jamais. »
Pour ce faire éclairons la laïcité par la citoyenneté et la citoyenneté par la laïcité, au nom de notre attachement à la République.
Retrouver l’amour de la République
Prolongeant et amplifiant la citoyenneté intégratrice et laïque, la tradition républicaine depuis Montesquieu, Rousseau et Condorcet nous rappelle que l’unité de la Cité repose sur l’amour de la République. Cet amour est même pour Montesquieu « le principe des républiques » (chapitre 2 et 3 du livre IV de l’Esprit des lois). Il s’éprouve dans l’amour des lois, de la patrie et de l’égalité. Le philosophe se tourne vers l’éducation, notamment familiale, pour le transmettre. Condorcet y ajoutera le devoir d’instruction publique, car « il faut qu’en aimant les lois on sache les juger ».
Cet amour de la République permet cette co-existence pacifique et rationnelle des libertés qui donne tout son sens au principe de laïcité, qui sera formalisé en 1905.
Je crois que si les terroristes sont allés jusqu’au bout de la haine, les citoyens laïques et républicains ne sont pas encore allés jusqu’au bout de l’amour de la République.
Cet amour ne pourra pas tout mais il pourra beaucoup. Nous en appelons au « vivre ensemble » parce que nous n’osons plus aimer ardemment la République. Car enfin on peut « vivre ensemble » en vivant côte à côte : les communautaristes y trouveraient parfaitement leur compte.
L’amour de la République, comme tout amour, se renforce dans son affirmation même (« Marianne, je t’aime ! » écrivit un jour Patrick Kessel). Il nous faut aussi ce cri du cœur pour développer notre citoyenneté laïque et humaniste ; c’est l’âme de l’intégration républicaine.
Trois obstacles à surmonter d’urgence
Cet attachement à la République n’apparaît pas clairement aux yeux de tous car trois obstacles brouillent les choses.
On met souvent de la mièvrerie partout et nulle part de la solidarité fraternelle et discrète.
L’amour de la République s’en trouve négligé et les candidats en campagne ne semblent pas croire ce qu’ils disent.
Conclusion : cinq engagements concrets pour la République
Chérir la République est important, le manifester publiquement et concrètement est encore plus nécessaire.
Nous devons gagner tous ces combats laïques, humanistes et républicains pour tous les martyrs de la liberté.
Charles Coutel
charles.coutel@univ-artois.fr
Lire aussi Colloque du CLR « L’après-janvier : plus que jamais la République laïque » (Paris, 14 mars 15) (note du CLR).
Comité Laïcité République
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