Avec la participation du CLR

Ch. Coutel : "Transmettre la laïcité : un devoir pour tous les républicains" (Charles Coutel pour le CLR, Fête de la laïcité, Paris, 26 juin 21)

Fête de la laïcité, Paris, 26 juin 21. 27 juin 2021

Fête de la laïcité, Paris, le 26 juin 2021
Intervention de Charles Coutel
Vice-président du Comité Laïcité République

Transmettre la laïcité : un devoir pour tous les républicains

Merci pour cette invitation ! Je vous transmets le salut et le soutien de Gilbert Abergel, président du Comité Laïcité République, ainsi que de tous les membres du CLR.

Fêter, promouvoir, défendre, célébrer, chérir, faire vivre le principe républicain de laïcité ; nous prenons tout ! Et plus encore, la volonté de transmettre la laïcité qui nous anime tous. Au CLR, nous revendiquons le désir de transmettre l’héritage républicain et pas seulement de communiquer sur lui. Transmettre est un acte qui se déploie dans la durée et qui mobilise nos idéaux républicains et humanistes, avec la conscience de devoir les reformuler en innovant, c’est ce que dit aussi le mot proche de tradition, cœur de l’humanisme républicain universaliste, héritier des Lumières. C’est cette tradition émancipatrice que les ennemis de la République méconnaissent. C’est pourquoi communiquer sur la laïcité ne suffit pas et qu’il nous faut donc transmettre car cela nous permet d’être à la fois des héritiers fidèles du passé et des architectes audacieux de l’avenir.

Vouloir transmettre la laïcité est donc essentiel. Ce principe prolonge la devise républicaine « Liberté, Égalité, Fraternité » et s’amplifie encore dans la solidarité. Les républicains, à travers leur longue histoire, ont appris à surmonter les épreuves, les illusions et les échecs, à travers lesquels ils ont appris à préciser tous ces termes, en revendiquant toujours mieux la liberté de conscience, notamment avec la loi de 1905. C’est cette exigence que nous faisons vivre à travers le réseau des Associations et des Obédiences réunies aujourd’hui.

Ainsi sachons retenir les leçons du Programme de Belleville que défendirent les héros de la Commune ; les leçons du Front populaire qui, animé par un désir de justice sociale, développa avec Jean Zay la laïcité de la République et de son École ; les leçons de la Résistance qui sut inscrire l’exigence de laïcité dans une promotion de la solidarité. Toutes ces initiatives courageuses contribuèrent à l’intégration de la laïcité dans notre Constitution. C’est toute cette tradition de combat que nous devons transmettre.

À travers tous ces grands moments républicains, l’École républicaine et laïque fut régulièrement réinstituée. Transmettre suppose une école qui instruit par l’enseignement des disciplines scientifiques et en formant des citoyens. Or, aujourd’hui, tout est à refaire.

Pour bien transmettre, il faut d’abord prendre la mesure des défaillances actuelles au sein des institutions dédiées à la transmission des principes républicains. Les précédents orateurs ont, à juste titre, fait le relevé des défaillances, comme le remarque aussi le récent rapport Obin : pour reprendre une expression de Charles Arambourou de l’Ufal, « un fossé générationnel » s’est creusé, qu’il nous faut d’urgence combler. Le 29 juin au soir, ce sera le thème d’un débat confraternel entre l’Ufal et le CLR [1]. Dans ces échanges, placés dans le cadre d’une nécessaire reconquête républicaine, nous insisterons sur l’importance d’une reconquête de tout le lexique républicain, fidèle en cela au vœu du grand poète Francis Ponge qui écrit : « La meilleure façon de servir la République est de redonner force et tenue au langage » (Pour un Malherbe).

Transmettre la laïcité suppose d’abord de rompre avec le vocabulaire de nos ennemis cléricaux : « vivre ensemble », « sociétal », « compassion », « vulnérabilité », « bienveillance », etc.

Mais ce travail sur les mots ne suffira pas. Insistons, pour combler l’actuel fossé générationnel, sur la nécessité de former tous ceux qui ont en charge cette responsabilité ; prenons à la lettre cette remarque de Jean-Michel Blanquer, qui écrit le 1er février 2021 : « Seule une laïcité bien comprise par les professeurs peut être une laïcité bien transmise aux élèves. »
Monsieur le ministre, aux actes ! Monsieur le ministre prenez davantage en compte les constats alarmants faits par les militants laïques des Associations et Obédiences rassemblées aujourd’hui. Écoutez davantage nos amis de Vigilance Collèges Lycées, de Vigilance Universités, de l’Observatoire du décolonialisme, de Regards de femmes, des Libres Mariannes, de l’Ufal et du CLR.

Il appartient aux Républicains et aux humanistes de soutenir tous les militants qui se battent pour les libertés d’expression et de conscience, comme la jeune et courageuse Mila. Cette mobilisation associative, civique et morale doit se mettre au service des jeunes générations que la puissance publique n’instruit plus assez. Sachons retenir l’avertissement du philosophe Georges Canguilhem qui, en héritier de Condorcet et de Gramsci, écrit : « J’ai besoin d’apprendre à connaître les choses pour les changer. » Transmettre la laïcité c’est d’abord tout faire pour réinstituer une École républicaine gratuite, mixte, obligatoire, élémentaire, humaniste et donc laïque.

Définir le principe de laïcité par la simple neutralité, par la simple tolérance ou la seule séparation entre les Églises et l’État ne suffit pas. Ce principe gagne à se mettre au service de toute la cause républicaine. N’attendons pas que la République soit attaquée pour la défendre et la chérir.

Notre CLR avance trois propositions :

1) Promouvoir l’enseignement des principes républicains fondés sur des définitions claires, adaptées et simples, puisées dans les classiques de la République. Dans cette reconquête du lexique républicain, appuyons-nous sur les savoirs rationnels et les humanités. Pour les républicains, une science est d’abord une langue bien faite qui sait se mettre à la portée de tous, comme l’ont voulu les fondateurs de l’instruction publique ou encore des universités populaires.

2) Développer une approche juridique du principe de laïcité notamment dans la formation des maîtres, actuellement en grande partie livrée à nos adversaires, comme le souligne le rapport Obin.

3) Instaurer un enseignement solide portant sur l’histoire des institutions républicaines et de l’École républicaine. C’est en étudiant cette histoire que l’on prendra la mesure des erreurs et des crises passées que les républicains ont surmontées.

Ces mesures sont faciles à décider et à mettre en place.

Mais ces propositions resteront vaines si nous en restons aux mots et aux incantations. Transmettre la laïcité, c’est d’abord devenir nous-mêmes de plus en plus laïques dans nos engagements et dans nos vies.
Sachons trouver ténacité et courage auprès de tous ceux qui, dans le passé ont accepté de mourir pour la République et donc pour l’exigence de laïcité.

Honneur à toi Chevalier de la Barre,
Honneur à vous héros de Valmy,
Honneur à vous combattants de la Commune,
Honneur à vous Jean Zay, Pierre Brossolette, Jean Moulin, Arnaud Beltrame, Samuel Paty.

C’est aussi pour vous que nous ferons tout pour toujours mieux transmettre la laïcité et la République humaniste et sociale qui en est l’animatrice.

Vive la République laïque et sociale !

J’ai dit,
Charles Coutel



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