Régis de Castelnau, avocat. 26 juillet 2017
"[...] Pour être éligible, il faut être électeur. Et tout citoyen français dispose du droit de vote, et par conséquent se trouve être éligible. On peut priver de ces droits fondamentaux, comme on peut le faire de la liberté avec la prison, mais l’inéligibilité est une peine. Et comme toutes les peines, dans une société démocratique, elle va devoir être prononcée par un juge après une procédure contradictoire régulière.
Et la Constitution ?
La loi française la prévoit comme « une peine accessoire », qui doit être appliqué dans le respect des principes du droit pénal de personnalisation et de proportionnalité de la peine. Tout ceci résulte de la Déclaration des Droits de l’homme et du citoyen, de la Constitution, et de la Convention Européenne des Droits de l’Homme. Excusez du peu. Il n’y a pas de peines automatiques, celles-ci sont proscrites. Donc faire dépendre l’éligibilité d’un citoyen par ailleurs électeur, qui a accompli sa peine et payé sa dette à la société, est une façon de le chasser à jamais de la communauté des citoyens. C’est radicalement inconstitutionnel.
[...] Alors pourquoi s’exprime régulièrement ce besoin compulsif de pénal, et cet amour de la punition ? Comment cette pulsion peut-elle être aussi fréquemment reprise et flattée par ceux qui s’imaginent que le populisme judiciaire sera utile pour leur permettre de se dispenser de faire la preuve de leur efficacité dans la défense de l’intérêt général ?
Plusieurs sentiments se combinent, mais finalement celui qui domine est celui de la défiance vis-à-vis des électeurs. Ceux qui ne sont pas moi, et qui votent mal. Prenons simplement l’exemple emblématique de Patrick Balkany. Voilà un maire caricatural, tête de turc des médias qui sera battu à la régulière en 1995 par un candidat se présentant comme un Monsieur propre. Mais le Zorro sera battu à l’élection suivante, victime de son incompétence, Balkany faisant un retour triomphal en 2001. J’habiterais Levallois-Perret, aucune chance que je vote pour lui, mais une très grande majorité des habitants de cette ville ne sont pas de mon avis. Alors ceux-là, il faudrait les priver de leurs moyens de choisir ? Parce qu’ils ne pensent pas comme moi ? Pas d’accord, un homme (une femme) une voix. [...]"
Lire "Casier judiciaire vierge des candidats : le grand bluff".
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