Revue de presse

C. Pina : "On ne pourra plus traiter d’islamophobes ceux qui dénoncent les islamistes" (marieclaire.fr , 16 nov. 15)

Céline Pina est conseillère régionale (PS) d’Ile-de-France, élue du Val d’Oise. 18 novembre 2015

Corine Goldberger : Comment interprétez-vous le carnage djihadiste du 13 novembre à Paris ?

Céline Pina : Ces attentats étaient prévisibles. Ils avaient même été annoncés. Je me souviens de l’interview du juge Trevidic, il y a à peine un mois dans Paris Match. De plus, depuis les attentats de janvier, rien n’a vraiment été fait pour lutter contre cette parole extrêmement dangereuse, cette idéologie obscurantiste, violente, qui ne célèbre que la puissance et la mort, et qui ensemence la tête des gens. Nous avons été attaqués pour ce que nous sommes. Pour ce que nous représentons. Notre volonté de défendre la laïcité, l’égalité femme homme, les libertés publiques. Oui il faudra se battre, oui il y aura sans doute un travail à faire pour sécuriser et protéger la population, qui est digne, debout. La meilleure solution aujourd’hui, pour éviter le terrorisme islamiste, c’est de lutter réellement contre ses propagateurs sur le terrain, avec des mesures concrètes, et se battre aussi sur le terrain des mots. Nous devons réaffirmer notre force de vie, nos valeurs.

Pourquoi les élus ne dénoncent pas l’islam radical en France, pourquoi êtes-vous quasiment la seule ?

Parce que l‘islam radical tue. Les élus se taisent parce qu’ils ont peur de devenir des cibles. Mais aussi malheureusement, parce qu’il y a une dérive électoraliste, clientéliste. Les islamistes sont très forts parce qu’aujourd’hui, ils détiennent un potentiel de voix. Et ça se retourne contre nous tous. Par exemple, ils réclament des passe-droits, comme demander à ce qu’une mosquée neuve soit construite à côté du lycée, parce que pour eux « les deux savoirs sont équivalents ». Ou imposent des femmes voilées dans des maisons de quartiers publiques, en dépit de la loi sur les signes religieux. Mais c’est toujours subtil. Ce sont des luttes d’influence destinées à montrer leur pouvoir local. Ils ont un vrai projet politique, prosélyte pour la France et c’est là où ça devient dangereux. Certains le disent tel quel : il n’est pas interdit d’avoir pour objectif qu’un jour la France soit musulmane. Aujourd’hui, dans les banlieues, il y a des gens qui n’entendent plus jamais un discours d’émancipation de la part de leurs représentants politiques. Résultat : ici, dans le Val d’Oise, la minute de silence à la mémoire des victimes du 13 janvier, a globalement été bien observée dans les établissements scolaires, mais il s’est encore trouvé quelques provocateurs pour la refuser, ou sortir un Coran.

Est-ce que ces nouveaux attentats vont changer notre façon de penser ?

Oui, les lignes vont bouger, mais il y aura des résistances. C’est horrible, mais j’ai presque envie de dire que c’est humain. Ainsi ceux qui ont proclamé « je ne suis pas Charlie » (« ils l’ont bien cherché, les dessinateurs ») le pensent toujours aujourd’hui. Ils ont mis toute leur crédibilité dans cette posture et ils ne voudront pas perdre leur statut. J’entends aussi des gens qui disent que vendredi, « on a tué des Français innocents ». Ça veut dire quoi ? Que les Juifs assassinés à l’Hypercasher en janvier n’étaient pas innocents parce qu’ils étaient juifs ? Face à l’horreur, il y a deux attitudes possibles : soit vous prenez conscience de la volonté de mort absolue des djihadistes français, soit vous vous enferrez dans l’erreur : vous cherchez des explications rationnelles, vous pointez les responsabilités de la France, pour pouvoir continuer à proclamer : « Vous voyez, j’avais raison ». Mais on ne fera plus taire les gens qui dénoncent l’islam radical en les accusant d’être islamophobes. Si on veut protéger les musulmans laïcs et républicains, il faut tracer une frontière claire entre ceux qui font passer la loi des hommes avant la loi divine, ceux qui acceptent notre monde commun, et ceux qui le refusent. De toute façon, qu’on accepte nos valeurs ou pas, les balles des tueurs, elles ne font pas de distinction. Elles tuent tout le monde."

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