Note de lecture

B. Fuligni : les fondateurs de la laïcité

par Patrick Kessel 22 octobre 2015

Bruno Fuligni, "Dieu au Parlement", Omnibus, sept 2015.

En proclamant la liberté de conscience, les constituants de 1789 ouvraient à l’esprit une faculté rare et précieuse, et quelque peu vertigineuse : la liberté de croire ou de ne pas croire, de pratiquer ou de ne pas pratiquer une religion, la liberté philosophique entre toutes qui est la liberté de douter. Sous l’Ancien régime, la religion légitimait le pouvoir de la monarchie absolue et prescrivait les règles de la morale, le vrai et le faux dans la science, le beau et le laid dans l’art, la famille, le mariage, l’instruction, les naissances et les décès, les actes civils.

Aujourd’hui encore, l’Eglise demeure très active contre la contraception, l’IVG, le divorce, le mariage pour tous, le droit à mourir dans la dignité, l’abrogation du concordat... Dans de nombreux pays où religion et politique se confondent, les femmes en sont les premières victimes et des militant laïques payent de leur vie leur engagement.

Avec la Révolution française s’ouvre un champ de luttes pour les libertés individuelles et collectives et pour la laïcité, bien loin d’être achevées aujourd’hui encore. Les parlementaires d’aujourd’hui auraient-ils l’audace de leurs prédécesseurs qui ne s’assurent pas même de la réelle application de la loi de séparation dont on célèbrera en décembre les 110 ans ? Ce sont les principaux discours fondateurs de la laïcité « à la française » et de ses irréductibles opposants, que Bruno Fuligny, a rassemblé et mis en scène, pour notre plus grand bonheur, dans « Dieu au Parlement ».

On découvrira, ou on retrouvera, les dossiers qui enflammèrent le Parlement : l’abjuration des prêtres, la déesse Raison, l’école laïque, le Concordat, le cléricalisme, la création des lycées de jeunes filles, le droit à mourir en libre-penseur, la séparation, la crise des inventaires, la pilule, l’IVG, l’affaire du voile et, pour une fois à l’unisson, le vibrant hommage de la représentation nationale aux victimes des attentats barbares de janvier 2015. On y retrouvera, parmi d’autres, Boissy d’Anglas, Maurice Barrès Aristide Briand, Benjamin Constant, Fabre d’Eglantine, Jean Jaurès, Victor Hugo, Léon Gambetta, Jules Ferry, Georges Clemenceau, André Malraux, Maximilien Robespierre, Michel Debré, Jean-Pierre Raffarin et Manuel Valls. On y apprendra que le baron de Menou, engagé avec Bonaparte en Egypte, fut le premier parlementaire musulman de l’histoire de France ou, qu’en 1825, le Garde des Sceaux Peyronnet, partisan du trône et de l’autel, présenta un projet de loi punissant de mort « la profanation des hosties consacrées, commises publiquement ».

On en sourirait aujourd’hui si l’obscurantisme n’était d’une actualité aussi brûlante. De salutaires rappels par l’auteur de nombreux ouvrages sur la laïcité, la République, du scénario du film « la Séparation » et d’une pièce, « Clémenceau-Jaurès ».

Patrick Kessel


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