23 juillet 2009
"Il y a quelques semaines, Télérama a publié une enquête très instructive sur la réalité des collèges. L’écrivain Robert Bober, auteur de « Quoi de neuf sur la guerre ? », était invité dans une classe du collège de Wazemmes, près de Lille. Il a montré des témoignages d’enfants juifs sous l’Occupation. L’image d’une femme aux cheveux blancs est apparue. Elle évoquait ses souvenirs de gamine échappant à une rafle et elle concluait : « A cette époque, les enfants n’étaient pas déportables. » Rires dans la classe. « Comment ils faisaient, t’imagines, ils n’avaient pas de portables ! » Et ce rire a duré toute la séance. Des portables au lieu de « déportables » et de toute l’histoire du monde : c’est cela, la disparition de l’essentiel. Et notre plus grande tâche politique est de faire face à cette situation. [...]
Il reste peut-être deux camps, mais pas sur tous les sujets. La gauche et la droite ont rivalisé dans le culte du génie de Michael Jackson, l’artiste hors normes qui a repoussé les frontières du kitsch, et les services culturels des magazines de droite comme de gauche ont exigé toujours plus de place pour commenter hyperboliquement l’émotion planétaire qu’a provoquée sa mort. Pour ce qui est de la déculturation générale, il n’y a plus ni droite ni gauche, il n’y a qu’un seul parti : le Parti du sens du poil. [...]
L’affaire de la burqa me paraît extrêmement révélatrice. On propose à nos sociétés un avenir multiculturel, et le grand paradoxe du multiculturalisme, c’est que toutes les cultures sont les bienvenues à l’exception d’une seule, la culture du pays hôte. Pour être authentiquement multiculturelle, pour accueillir la diversité comme il se doit, la France est tenue de ne plus être une nation substantielle, mais une nation procédurale simplement vouée à organiser la coexistence des communautés qui la composent. Les députés qui ont dit non à la burqa refusent cet avenir, et à mon avis ils ont raison. La France n’est pas seulement la patrie des droits de l’homme, c’est une terre de vieille civilisation. Au coeur de cette civilisation, il y a la mixité, une visibilité heureuse des femmes qui remonte à l’amour courtois et que nous devons absolument maintenir. Cessons de tout formuler dans l’idiome des droits de l’homme. Plutôt que d’opposer le langage des droits de la femme à celles qui revendiquent fièrement leur droit culturel à vivre dans un linceul, il faut leur opposer nos moeurs."
Lire Finkielkraut : « Il ne reste que le parti du sens du poil ».
Lire notamment Foulard islamique : « Profs, ne capitulons pas ! » (Le Nouvel Observateur, 2 nov. 89). Alain Finkielkraut faisait partie du Comité fondateur du Comité Laïcité République (note du CLR).
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