Revue de presse

"Abayas à l’école, les ambiguïtés d’une interdiction" (La Croix, 29 août 23)

(La Croix, 29 août 23) 29 août 2023

[Les éléments de la Revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

"Analyse Pour sa première rentrée scolaire, le ministre de l’éducation Gabriel Attal s’affirme sur le terrain de la laïcité. Le port des abayas, tenues amples portées par des élèves musulmanes, sera désormais interdit dans les établissements scolaires.

Bernard Gorce

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Lire "Laïcité : abayas à l’école, les ambiguïtés d’une interdiction".

Pour le port de l’abaya par des élèves, ce sera donc un « non » de principe. Comme il l’avait promis aux recteurs d’académie, le jeudi 24 août, puis annoncé sur TF1 dimanche, le nouveau ministre de l’éducation nationale Gabriel Attal a réaffirmé lundi 28 août lors de sa conférence de presse de rentrée l’interdiction dans les établissements scolaires de cette tenue ample portée par certaines jeunes filles musulmanes.

Le ministre a précisé qu’il adressera dans les jours à venir une « note de service » qui précisera la mise en œuvre de la mesure et qu’il va réactualiser le document de référence, le « vade-mecum de la laïcité ». Pour bien engager toute l’autorité de l’institution, il va aussi justifier la mesure par une lettre signée de sa main que les chefs d’établissement pourront adresser aux familles concernées.

Une vague récente qui inquiète

Près de vingt ans après la loi de 2004 interdisant le port ostensible de signes religieux à l’école, le ministre hausse le ton face à une pratique encore récente mais qui, à l’heure des réseaux sociaux, prend une ampleur qui désarçonne certains établissements.

En juin 2022, une note avait atterri sur le bureau du nouveau ministre de l’éducation Pap Ndiaye. Le document était signé du conseil des sages de la laïcité, de la direction de l’enseignement scolaire ainsi que du « pôle valeurs de la République » de l’institution. Il alerte sur cette nouvelle vague des abayas (et dans une moindre mesure, sur le port de qamis par des garçons). « Les conséquences pourraient en être, d’une part, la multiplication de ces tenues par conformisme social et souci d’appartenance communautaire et, d’autre part, l’apparition de conflits et de troubles du fonctionnement de l’école ou de l’établissement », s’alarme le document que La Croix a pu consulter. Il en appelle à une réponse forte et claire de l’institution.

Mais Pap Ndiaye ne réagit pas, et il faut attendre la rentrée 2022 pour qu’il reconnaisse le « phénomène ». En novembre, il adresse une première note aux personnels éducatifs. Pour le ministre, ces abayas ne sont pas en soi des vêtements religieux, au même titre que le voile ou la kippa cités à titre d’exemple par la loi de 2004. Il s’en remet au pouvoir d’appréciation des chefs d’établissement, appelés à réagir « au regard du comportement de l’élève ». Si le vêtement est porté de façon régulière, que l’élève refuse de l’ôter, qu’il s’agit de la tenue qu’il porte aussi pour les fêtes religieuses, des sanctions peuvent être engagées.

« On nous a laissé dans une situation d’interprétation difficile, regrette Carole Zerbib, membre du SNPDEN, le principal syndicat des chefs d’établissement. Il y a une inégalité de traitement d’un lycée à l’autre et, pour certains collègues, la peur d’intervenir, surtout depuis l’assassinat de Samuel Paty. »

L’abaya, une définition difficile

Quelques semaines après sa prise de fonction, Gabriel Attal marque sa différence avec son prédécesseur en affirmant que les abayas sont bien en tant que tel un vêtement religieux qui doit à ce titre tomber dans le champ de la loi de 2004. Mais plus qu’un changement de doctrine, le virage met en valeur un style, un tempérament. Selon nos informations, le cabinet de Pap Ndiaye travaillait déjà sur une nouvelle instruction plus ferme dans la perspective de l’actuelle rentrée. Les derniers rapports de l’administration faisaient état d’une augmentation inquiétante des signalements d’atteinte à la laïcité liés en particulier aux tenues religieuses, et les organisations professionnelles pressaient le ministre d’intervenir. « Pap Ndiaye n’était pas sur cette ligne de la fermeté, mais le réel s’est imposé à lui » analyse Alain Seksig, secrétaire général du Conseil des sages, qui se félicite de la réaction rapide de son successeur. « Désormais, les choses sont dites. » [...]

Alain Seksig admet lui aussi que la question des tenues religieuses ne sera pas traitée en un trimestre mais juge qu’il fallait en passer par la voie de l’interdiction. « Nommer un problème, ce n’est pas le régler, mais c’est se mettre en capacité d’y parvenir. Il faudra du temps mais on repart sur des bases claires. » [...]

Les autres chantiers du ministre de l’éducation

Mieux payer les professeurs. Tous gagneront 158 € net de plus par mois en moyenne à la rentrée. Les volontaires gagneront 1 131 € net par an de plus, en contrepartie de nouvelles missions.

Lutter contre l’absentéisme des professeurs, en organisant les tâches administratives et la formation continue en dehors des temps de présence en classe et en organisant les remplacements de courte durée entre collègues.

Organiser un « choc des savoirs fondamentaux », en insistant sur le français et les mathématiques.

Dédoubler les classes en éducation prioritaire, limiter partout ailleurs les effectifs à 24 élèves de la grande section au CE1.

Raccourcir les vacances des enfants qui ont besoin d’un soutien scolaire en généralisant les prérentrées de remise à niveau et le dispositif « devoirs faits » partout.

Favoriser l’inclusion des élèves handicapés en ouvrant une classe Ulis par collège d’ici à 2027.

Rénover 10 000 écoles d’ici à 2027."



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