1er octobre 2011
Anne Hidalgo, Première adjointe au maire de Paris, souligne d’abord la grande importance de la question de la laïcité, en particulier à Paris, ville de la liberté. Les élus ont un devoir : faire vivre la laïcité et se battre pour elle.
Née au-delà des Pyrénées, Anne Hidalgo sait que la laïcité est un joyau qui ne fait pas encore partie du système politique espagnol. Il faut la défendre, la préserver, la promouvoir, parce qu’elle permet de maintenir la liberté de croire ou de ne pas croire, de pratiquer ou non un culte, d’adhérer ou non à telle ou telle philosophie.
Le relativisme culturel, souligne-t-elle, ne peut que venir atténuer la liberté de pensée, garantie par la laïcité. Et, à cet égard, le travail de Caroline Fourest sur le multiculturalisme doit être salué. Il faut opposer au communautarisme le modèle républicain, intégrateur.
Des mesures concrètes promouvant la laïcité sont néanmoins nécessaires. Ainsi, il faut se battre pour la neutralité des crèches. C’est pourquoi nous avons accordé notre soutien à Natalia Baleato, directrice de Baby Loup. Les élus parisiens sont donc mobilisés au côté du Comité Laïcité République.
Anne Hidalgo conclut son discours par une double annonce qui illustre l’engagement laïque de la municipalité parisienne :
Odile Saugues, député du Puy-de-Dôme et présidente du jury, dénonce l’intrusion du religieux dans le politique. Malheureusement, beaucoup d’élus, au nom de la tolérance, adoptent l’attitude du « courage, fuyons ! ». Elle a voté la loi sur le voile intégral en vertu du principe d’égalité hommes-femmes, comme Robert Badinter ou Manuel Valls.
La députée du Puy-de-Dôme estime que la loi de 1905 doit être notre seule référence et met en garde contre les glissements successifs, incarnés récemment par les arrêts du Conseil d’Etat de juillet 2011. Elle demande le respect de la loi de 1905 et son inscription dans la Constitution.
Et elle conclut par un hommage aux lauréates : « Nous avons besoin de résistantes de la trempe de Natalia Baleato et de Nadia El Fani. »
Lire Prix de la laïcité 2011. Discours d’Alain Seksig (HCI).
Pierre Bergé déclare avec force que la loi de 1905 est menacée. Il martèle que la laïcité est un combat qui a été abandonné par ceux-là mêmes qui auraient dû le mener. Il emploie à nouveau le terme "combat", car les adversaires de la laïcité ne pensent qu’à abolir la loi de séparation de 1905. Si nous ne comprenons pas que lesdits adversaires vident peu à peu cette loi de son sens, ils gagneront. Heureusement, on a légiféré sur le voile, puis sur le voile intégral, et on légiférera encore.
Il déclare qu’il ne pouvait pas tenir un discours autre qu’un discours de guerre parce que la loi de 1905 est menacée. Il conclut en déclarant que l’immobilisme, en matière laïque, c’est le recul des libertés.
Elisabeth Badinter, philosophe, se dit réconfortée par le nombre de participants à la cérémonie de remise des prix de la laïcité, se rappelant la solitude ressentie dans les combats
menés pendant vingt ans. Depuis 1989, elle a compris que la laïcité n’avait pas le même sens pour tout le monde.
Elle affirme que la situation est très mauvaise, d’où sa volonté d’aider la crèche Baby Loup. Elle a été surprise que si peu de femmes, parmi les parlementaires, aient voté la loi sur le port du voile intégral et remercie Manuel Valls pour l’aide qu’il a apportée dans ce domaine, contrairement à beaucoup d’autres représentants de la même sensibilité.
Elisabeth Badinter est au regret de constater qu’à gauche, on a laissé s’installer l’équation "laïcité = racisme", mesurant ainsi le courage de Manuel Valls et d’autres d’avoir
dit non. Natalia Baleato, directrice de Baby Loup, a, elle aussi, dit non, ayant le courage de provoquer un conflit. Celle-ci comme l’autre lauréate, Nadia El Fani, ont du courage de caractère, mais également un courage physique que d’autres n’ont pas.
Elisabeth Badinter termine son intervention en rappelant que sans Etat laïque il n’y a pas d’égalité pour les femmes. A cet égard, Baby Loup est une oeuvre féministe, d’égalité, qui
permet aux femmes de travailler, donc d’être indépendantes. Elle dit "merci" aux deux lauréates.
Natalia Baleato assure qu’elle ne fait qu’appliquer les principes de laïcité, exigence quotidienne concernant toutes les personnes résidant sur le territoire français.
La crèche Baby Loup a créé un lieu d’accueil adapté aux besoins des parents, dans un quartier riche de mixité et dans une ville, Chanteloup-les-Vignes, qui est l’une des plus pauvres de France. Cette crèche représente un bien commun du quartier, qui permet de vivre ensemble par-delà les différences.
La laïcité est une philosophie qui nous fait considérer les enfants comme des citoyens en devenir. La rencontre avec les autres permet de forger des esprits critiques. Au procès, le procureur a rappelé que la loi était la même sur tout le territoire français.
Natalia Baleato termine son propos par un hommage à tous ceux qui oeuvrent pour le respect des principes laïques et réaffirme que l’on doit protéger les bébés et les
enfants de ceux qui refusent la liberté de conscience.
Nadia El Fani explique qu’elle avait commencé le montage de son film (sur la façon dont les gens observaient ou non le ramadan en Tunisie) quand la révolution tunisienne a commencé. Elle est repartie pour la Tunisie le lendemain de la chute de Ben Ali. Là-bas, le mot "laïque" revenait souvent. La cinéaste a été attaquée par les islamistes, mais aussi par les progressistes (sur le thème « la laïcité, ce n’est pas le moment d’en parler »). Or, pour elle, la religion doit être séparée de l’Etat et du politique.
Plus personne ne veut diffuser son film, Laïcité, inch’ Allah !, en Tunisie, depuis l’agression d’islamistes qui ont perpétré des violences et molesté des personnes dans
une salle, à Tunis, où était projeté le film. Des islamistes qui s’emploient à ce que le terme "laïcité" fasse peur, en assurant à la population qu’avec la laïcité c’est l’athéisme qui lui sera imposé.
C’est pourquoi le débat sur la laïcité doit être mis sur la table de la Constituante tunisienne, prévue pour octobre. Les dés ne sont pas encore jetés...
Comité Laïcité République
Maison des associations, 54 rue Pigalle, 75009 Paris
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