Revue de presse

La loi « Baby-Loup » vidée de sa substance (la-croix.com , 5 mai 15)

5 mai 2015

"Les députés socialistes et radicaux ont élaboré hier une solution pour vider de sa substance une proposition de loi très polémique qui sera débattue la semaine prochaine.

Adoptée par le sénat en 2012, la proposition de loi (PPL) qui vise à imposer un devoir de neutralité dans les structures d’accueil de la petite enfance subventionnées a été introduite dans le calendrier de l’Assemblée après les attentats de janvier. Mais ce texte a provoqué une levée de boucliers dans le monde associatif et parmi les juristes. Et la majorité s’est aperçue un peu tard que la PPL était une vraie-fausse bonne idée.

L’examen du texte porté par les radicaux de gauche devait avoir lieu le 12 mars mais a in extremis, sur pression de l’Élysée, été reporté au 13 mai. Ce qui laissait deux mois pour trouver une solution au piège de cette loi « Baby-Loup », du nom de la crèche à l’origine du texte. Mission a été confiée par leurs groupes respectifs au député socialiste Philippe Doucet et au rapporteur du texte, Alain Tourret (PRG), de trouver une solution.

Hier, les deux élus se sont entendus sur un scénario. La proposition de loi n’est pas abandonnée, comme le demandaient notamment la CNCDH (lire ci-dessous) et l’Observatoire de la laïcité, mais elle devrait être considérablement édulcorée.

Le premier article du texte examiné début mars en commission prévoyait que les lieux d’accueil des enfants de moins de six ans qui bénéficient d’une aide financière publique « peuvent apporter certaines restrictions à la liberté d’expression religieuse de leurs salariés au contact d’enfants ».

Toutefois, cette disposition ne valait pas pour les établissements « se prévalant d’un caractère propre porté à la connaissance du public intéressé », sur le modèle de l’enseignement privé sous contrat. Le deuxième article de la PPL étendait le dispositif aux « personnes morales de droit privé qui accueillent des mineurs protégés » (c’est-à-dire les moins de 18 ans).

Lors de la réunion de travail d’hier, les députés se sont entendus pour retirer ce deuxième article. Le texte n’en comptera donc plus qu’un, auquel devrait s’ajouter un préambule sur le principe de laïcité. Cet article unique devrait être en outre réécrit pour retranscrire dans la loi la jurisprudence de la Cour de cassation.

En juin 2014, mettant un terme au long contentieux de l’affaire Baby Loup, la haute juridiction avait rappelé qu’un règlement intérieur d’entreprise ne peut limiter l’expression religieuse des salariés que sous réserve de respecter certaines exigences (la mesure doit être motivée, justifiée par la nature des tâches à accomplir et proportionnée au but recherché). Il ne sera donc plus question que la PPL impose aux crèches un principe général de laïcité.

L’article 2, sur l’extension d’un devoir de neutralité à toutes les structures qui accueillent des mineurs, avait provoqué au mois de mars la fronde des associations éducatives. Le mouvement du scoutisme, toutes branches confondues, était monté au créneau, au point d’être reçu par le gouvernement qui lui avait donné des garanties.

« Le texte initial nous avait mis tout le monde à dos, des associations intégristes aux plus ouvertes », reconnaît le radical Alain Tourret qui précise avoir « hérité » d’un dispositif échafaudé au Sénat par le socialiste Alain Richard, renvoyant ainsi la responsabilité du cafouillage au parti majoritaire.

La nouvelle mouture « est une solution de compromis qui permet au PRG d’avoir une réaffirmation de la laïcité et aux socialistes de s’en tenir à la jurisprudence de la Cour de cassation, commente Philippe Doucet. Ce ne sera pas un texte agressif ».

Reste à savoir si ce rétropédalage suffira aux opposants, qui réclament notamment que l’article premier s’en tienne strictement aux crèches, en abaissant l’âge des enfants mentionné de 6 à 3 ans. L’opposition, qui n’est pas en reste de propositions de loi sur ce thème [...], devrait profiter la semaine prochaine des débats pour fustiger la confusion de la gauche."

Lire "La majorité cherche à sortir du piège d’une loi « Baby-Loup »".



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