4 juillet 2018
La loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État modifiée par l’Assemblée Nationale
La loi pour un État au service d’une société de confiance (ESSOC) a été adoptée en seconde lecture par l’Assemblée Nationale le 27 juin 2018. Plusieurs de ses dispositions portent atteinte à la laïcité en modifiant la loi de 1905.
Depuis des mois, le CLR alertait les associations laïques et les citoyens sur ce qui se tramait dans l’ombre. Le CLR Aix-Marseille-Provence avait écrit aux 16 députés des Bouches-du-Rhône pour leur demander de s’opposer par leur vote aux dispositions anti-laïques de cette loi.
Déposé par le Gouvernement à l’Assemblée nationale le 27 novembre 2017, le projet de loi ESSOC visait, selon lui à instaurer » le principe du "droit à l’erreur" et à porter une série de dispositions concrètes s’inscrivant dans la démarche de transformation de l’action publique".
Il est apparu que ce texte dissimulait plusieurs dispositions dites « cavaliers législatifs » qui affaiblissent la laïcité de la République, sans rapport avec l’objet du projet de loi.
Les articles 25 et 38 de la loi adoptée en seconde lecture par l’Assemblée Nationale confèrent désormais un traitement de faveur aux associations religieuses et favorisent l’opacité de leur activité en matière de financement ainsi que de lobbying.
L’article 25 autorise les associations religieuses à collecter des dons par SMS. Ce mode de financement était jusqu’alors réservé aux organismes faisant appel public à la générosité et défendant une cause scientifique, sociale, familiale, humanitaire, philanthropique, éducative, sportive, culturelle, ou concourant à la défense de l’environnement (par exemple l’UNICEF, la Fondation de France, le Secours Populaire, le Secours Catholique, l’Institut Curie…).
Le financement de l’exercice du culte, objet des associations cultuelles, est donc désormais placé sur le même plan que la défense de causes d’intérêt général.
Si les associations cultuelles seront soumises à l’obligation de faire une déclaration préalable au représentant de l’État, comme tous les organismes faisant appel public à la générosité, l’étude d’impact du projet de loi nous renseigne sur l’intention du gouvernement : « la déclaration préalable que devront faire les associations cultuelles ne suppose aucun contrôle de l’administration qui ne devra que la réceptionner. »
Ce nouveau mode de financement électronique par morcellement en d’infinies petites sommes provenant d’une multitude de particuliers, de surcroît hors du champ de contrôle de l’Etat, favorisera encore un peu plus l’opacité du financement des activités religieuses sur notre sol.
Ensuite, l’article 38 supprime l’obligation pour les associations cultuelles de se déclarer auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) et d’indiquer leur champ d’activités avec inscription au répertoire numérique rendu public. Cette obligation a été jugée par le gouvernement incompatible avec l’instauration d’un climat de confiance.
Traduction : la relation de confiance exige que les discussions et tractations des représentants des cultes avec les autorités politiques et les élus se déroulent de manière occulte et soient cachées à la vue des citoyens français. Confiance envers les représentants de cultes mais défiance envers la capacité de jugement des citoyens.
Par ces atteintes à la laïcité, veut-on favoriser le retour du pouvoir religieux et son immixtion dans les grands débats de société et la délibération publique qui doivent conduire à la confection de la loi républicaine.
Comment ces brèches dans la laïcité, principe de valeur constitutionnelle consacré par le Conseil Constitutionnel dans sa décision n° 2012-297 QPC du 21 février 2013, ont-elles pu être ouvertes ?
Dès le 5 décembre 2017, le CLR demandait dans une lettre au président de la République et au premier Ministre le retrait de ces dispositions. Loi "Société de confiance" : le CLR écrit à l’exécutif (CLR, 5 déc. 17)
Des amendements ont limité ces tentatives de faire échapper les associations cultuelles au droit commun, lors de la première lecture à l’Assemblée nationale, grâce à notre vigilance et au travail de députés laïques et républicains.
Mais en seconde lecture à l’Assemblée Nationale, le 26 juin 2018, la discussion sur les amendements visant à retirer les dispositions de l’article 38 s’est déroulée tard dans la nuit, l’importance du sujet ayant été dissimulée à l’information et au jugement des citoyens français.
Le CLR avait alerté l’ensemble des associations laïques et s’était mis en relation avec les députés républicains et laïques du groupe parlementaire LREM porteurs de l’amendement.
Le CLR Aix-Marseille-Provence avait écrit dès le 24 juin aux 16 députés des Bouches-du-Rhône pour leur demander de soutenir l’amendement présenté par les députés LREM Mme Stéphanie Kerbarh, Monsieur Jean-Louis Touraine et Mme Valérie Rabault, présidente du Groupe Nouvelle gauche à l’Assemblée nationale.
Pourtant, dans la nuit du 26 au 27 juin, les amendements fusionnés de la Nouvelle gauche et des députés laïques de LREM ont été rejetés, par 87 voix contre 85. 64 députés LREM opposés au texte de l’article 38 étaient présents sur les bancs.
Qui a voté quoi parmi nos 16 députés des Bouches-du-Rhône ? Qui était absent ?
Nous saluons l’engagement républicain des 4 députés LREM des Bouches-du-Rhône, Cathy Racon-Bouzon, députée de la 5ème circonscription, Monica Michel, députée de la 16ème circonscription [1], Jean-Marc Zulesi, député de la 8ème circonscription et François-Michel Lambert, député de la 10ème circonscription qui étaient au nombre des 85 députés qui ont mené la bataille.
Anne-Laurence Pétel, député LREM de la 14ème circonscription a voté contre l’amendement.
Étaient absents les onze autres députés des Bouches-du-Rhône :
Les députés Les Républicains : Bernard Reynes, Bernard Deflesselles, Valérie Boyer, Eric Diard, Guy Teyssier.
Les députés de La République en Marche : Mohamed Laqhila, Claire Pitollat, Alexandra Louis, Saïd Ahamada.
Le député de la Gauche démocrate et républicaine : Pierre Dharréville.
Le député de la France Insoumise : Jean-Luc Mélenchon.
CLR Aix-Marseille-Provence, 1er juillet 2018.
Contact : presse.clr@laicite-republique.org ou comite.laicite.republique.amp@gmail.com
[1] Nos excuses à Mme Monica Michel, députée de la 16ème circonscription des Bouches-du-Rhône, pour avoir indiqué par erreur dans une première version de ce texte qu’elle était absente lors du vote, alors qu’elle y a bien pris part et qu’elle a soutenu l’amendement laïque présenté.
Lire aussi Les laïques ont perdu une bataille mais ont recommencé à se battre (27 juin 18) et dans la Revue de presse Loi "Société de confiance" (2017-18) (note du CLR).
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