par Gilbert Abergel, président du Comité Laïcité République. 19 mai 2021
Le discours des Mureaux, le Projet de Loi confortant les principes républicains, les États Généraux de la Laïcité sont autant d’initiatives gouvernementales qui semblent signer une volonté politique d’en finir avec le déni qui a trop souvent caractérisé nombre de nos responsables face à la montée de l’islam politique.
En dépit des alertes qui fusaient depuis des années, voire des décennies, portées par des journalistes, des associations, des écrivains, des penseurs, de toutes origines, leurs regards se détournaient d’une réalité qui s’imposait chaque jour davantage. « Nul n’est prophète en son pays » écrivait Gilles Kepel, l’un des lanceurs d’alertes les plus constants, en conclusion de son dernier ouvrage, dénonçant ainsi cette stratégie de la « sourde oreille ».
On a suffisamment, et à juste raison, identifié et nommé ces alliés complaisants de l’islam politique, issus de milieux politiques, intellectuels, universitaires ou encore journalistiques. Les uns semblaient tétanisés par le risque de se voir traités d’"islamophobes", néologisme uniquement destiné à éteindre toute velléité de critique des religions, les autres attirés par d’illusoires bénéfices politiques, d’autres encore convaincus d’avoir à expier on ne sait quelle faute.
Les débats qui ont entouré la suppression programmée de l’Observatoire de la Laïcité, les contestations de certaines dispositions du projet de loi confortant les principes républicains, les attaques subies par le projet d’Etats Généraux de la Laïcité, témoignent de la persistance de ce déni.
Citons, à titre d’exemples, le communiqué publié par le Conseil National des Evangéliques de France, avec le soutien de l’Alliance Evangélique Mondiale alertant le Comité des Droits de l’Homme de l’ONU sur les atteintes à la liberté religieuse portées par le projet de loi confortant les principes républicains, ou encore les déclarations imprudentes de M. David Belliard, celles de M. Taché, puis les multiples offensives pour soutenir l’Observatoire de la Laïcité, et la liste n’est pas exhaustive.
La pression internationale serait négligeable si elle ne rencontrait un écho favorable au sein de nos territoires. L’entreprise de déstabilisation menée par le site Medya Turk, qui relaie les informations de l’agence de presse Anadolu, auprès de la « communauté turque » vivant en France est permanente. Ce media, qui se prétend objectif, nous informe, pêle-mêle, que Dieudonné a demandé l’asile politique à la Turquie, « pays où la liberté d’expression est encadrée par la constitution » aurait-il déclaré, qu’une circulaire du Ministère de l’Agriculture encadrant le contrôle de la protection animale n’a d’autre but que d’empêcher l’abattage hallal, que la presse française passe son temps à stigmatiser les turcs de France. L’appel à boycotter les produits français pour sanctionner notre pays qui aurait mal réagi après l’assassinat de Samuel Paty, révèle, quant à lui, le cynisme et la détermination des relais du pouvoir d’Erdogan.
En vue des prochaines élections régionales, l’Union Démocrate des Musulmans Français a déposé une liste dans la région « Grand Est ». Ce parti qui ambitionne de se substituer à la puissance publique pour venir en aide aux « déshérités des quartiers » porte par ailleurs, une revendication majeure : l’égalité de traitement de toutes les religions, donc l’application à un « culte non reconnu » du concordat, un système qui, selon ce parti, « fonctionne très bien à condition qu’il soit équitable ». En 2019 déjà, Ghaleb Bencheikh, président de la Fondation pour l’Islam de France, réclamait un assouplissement de la loi de 1905, en rappelant l’existence du Concordat en Alsace et Moselle. « On ne peut nous expliquer, disait-il, que la laïcité est une exception française, que le Concordat est une exception dans l’exception, et que l’Islam est une exception dans l’exception de l’exception » (L’Opinion, 17 sept. 2019)…
Que faut-il de plus à nos responsables politiques pour mettre un terme à ce régime concordataire qui apparaît de plus en plus comme la porte d’entrée de toutes les revendications qui, si elles devaient un jour être satisfaites, mettraient à bas notre laïcité ?
Et gageons que l’élection présidentielle du printemps prochain sera, l’occasion de surenchères, de tentatives de récupérations, d’attaques contre les principes républicains, contre la laïcité.
Les mesures gouvernementales contenues dans le projet de loi actuellement en débat s’avèrent donc nécessaires et urgentes, mais encore insuffisantes si l’ambition est bien de conforter les principes républicains.
Gilbert Abergel
Voir aussi dans la Revue de presse les rubriques La Turquie d’Erdogan en France dans Turquie, Elections : listes communautaires, Alsace-Moselle (note du CLR).
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