Revue de presse

Samuel Mayol : « Ce qui est arrivé à Samara peut arriver dans nos universités » (lefigaro.fr , 11 av. 24)

Samuel Mayol, maître de conférences à l’Université Sorbonne Paris Nord, ancien directeur de l’IUT de Saint Denis, Prix national de la Laïcité 2015, Secrétaire général du Comité Laïcité République. 13 avril 2024

[Les éléments de la Revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

"En aucun cas le respect d’une tradition religieuse ne peut justifier l’atteinte aux libertés fondamentales d’autrui."

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"L’effroyable agression dont a été victime Samara, cette jeune femme agressée pour ne pas avoir respecté des « normes religieuses », nous a tous choqués et indignés. Mais au-delà de l’horreur incontestable de cet acte, cette tragédie doit nous alerter sur un phénomène bien plus large : les pressions religieuses exercées sur nos campus universitaires. Loin d’être un sanctuaire protégé, l’université est aujourd’hui un terrain propice aux dérives communautaristes et aux tentatives d’imposer des codes vestimentaires ou comportementaux au nom de certaines traditions religieuses.

Comme nous le savons, la loi de 2004 interdisant le port des signes religieux au sein des établissements scolaires ne s’applique pas à l’université. Aujourd’hui l’emprise religieuse, notamment islamiste, est réelle au sein de nos universités. De nombreux témoignages et auteurs montrent, en effet, que la pression sociale et religieuse exercée par les mouvements islamistes radicaux est énorme et s’apparente davantage à de l’islamisme qu’à une simple pratique religieuse traditionnelle.

Cette pression ne se limite pas aux tenues vestimentaires, mais s’étend à tous les aspects de la vie. Comme le souligne Abdelwahab Meddeb, le jeûne du ramadan est devenu « un phénomène social, plus qu’un exercice spirituel » avec une pression communautaire forte pour s’y conformer, au risque d’être traité de « mécréant ». Le témoignage poignant de Nadia Benmissi à Aubervilliers illustre également ces pressions au quotidien, que ce soit sur le port du voile ou l’achat de produits halal, exercées par des groupes salafistes radicaux.

Au-delà des codes vestimentaires, les sources évoquent un véritable « contrôle social agressif » visant à imposer les rites et codes d’un islam radical dans certains quartiers. Une forme d’« entre-soi » communautaire étouffant le vivre-ensemble selon les principes républicains, à l’instar de ce que dénonce Jean-Pierre Obin pour les lycées et les collèges et qui s’étend désormais aux universités. Ces pressions insidieuses visent à contrôler les comportements, brider les libertés individuelles et museler toute pensée dissidente au nom d’une prétendue « morale » religieuse. Le vivre-ensemble et la libre circulation des idées font pourtant partie des piliers de l’université.

Ces dérives ne peuvent être tolérées. L’enceinte universitaire doit demeurer un espace de liberté, d’ouverture d’esprit et d’émancipation individuelle, protégé de toute emprise dogmatique. Comme l’a rappelé l’agression de Samara, les conséquences peuvent être tragiques lorsque l’obscurantisme l’emporte sur la raison. C’est pourquoi il est urgent d’agir en rappelant fermement les principes de laïcité, de neutralité et de liberté de conscience qui doivent prévaloir dans l’enseignement supérieur.

En aucun cas le respect d’une tradition religieuse ne peut justifier l’atteinte aux libertés fondamentales d’autrui. Des sanctions disciplinaires doivent être prises contre tous les étudiants ou groupes exerçant ce type de pressions inadmissibles. Protégeons nos campus de cette dérive sectaire.

Faisons de l’université un havre de paix où chacun peut étudier et s’épanouir en toute liberté et sécurité, à l’abri des injonctions moralisatrices et des pressions communautaristes. La tragédie de Samara doit sonner comme un électrochoc pour préserver ce bien commun essentiel qu’est la liberté de conscience."



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