Contribution

Sachons débattre dans le respect mutuel (H. Peña-Ruiz)

Henri Peña-Ruiz, philosophe, Prix de la Laïcité 2014, auteur de "Dictionnaire amoureux de la laïcité" (Plon). 29 août 2016

Droit de réponse en attente de publication depuis deux semaines.

Jean Baubérot et Philippe Portier me mettent vivement en cause dans l’article que Le Monde a publié le 16 août 2016 sous le titre « Non M. Pena-Ruiz, la laïcité n’est pas unique ». Sans vraiment réfuter mon argumentation, ils s’en prennent à ma personne comme telle en la qualifiant de façon insultante. Ils prétendent que je serais « naïf », « de mauvaise foi », que j’ignorerais délibérément les faits, que je serais dans le déni de réalité, et que mes propos seraient des « calomnies ». Le terme diffamatoire « calomnies » est d’ailleurs souligné par la mise en page du journal qui en fait un sous-titre.

L’insulte ne peut tenir lieu d’argument. Pour ma part je critique les opinions exprimées, sans jamais qualifier les personnes qui en sont les auteurs. Je considère que les notions de « laïcité de reconnaissance » et de « laïcité concordataire » sont des « cercles carrés » car elles sont contradictoires dès lors que la laïcité refuse tout privilège des croyants ou des athées. Parler de calomnies à ce sujet est diffamatoire. Critiquer des opinions n’est pas calomnier des personnes.

Mes contradicteurs prétendent me faire la leçon du haut de leur statut de sociologues ou d’historiens, qu’il utilisent comme principe d’autorité pour dire que je suis dans le « déni de réalité ». Cette condescendance est sans fondement. Ce n’est pas l’existence de plusieurs laïcités que l’on peut « constater », comme ils disent, mais celle de plusieurs invocations de la laïcité, dont certaines sont des usurpations. La notion de « laïcité concordataire » n’existe pas. C’est une expression inventée pour désigner de façon contradictoire l’entorse à la laïcité que sont les privilèges officiels de trois religions en Alsace-Moselle. Par ailleurs ils osent écrire que « j’ignore délibérément » un autre fait qu’ils prétendent « constater », à savoir que dans le passé le droit de vote aurait été refusé aux femmes, jugées trop soumises au clergé, « au nom de la laïcité ». Ils confondent ainsi la laïcité elle-même et son invocation : elle n’est donc pas la source d’une telle injustice. Nul fait constatable, mais une simple interprétation sans caractère scientifique. C’est l’idéologie machiste qui a prétendu que les femmes étaient soumises au clergé, donc dépourvues d’esprit critique, et non la laïcité. Soutenir un tel point de vue ce n’est pas s’affirmer laïque, mais se révéler à la fois machiste et antireligieux, ce qui est très différent. Bref on ne peut parler d’ignorance délibérée d’un « fait » inventé, que l’on prétend seulement « constater ». Mes contradicteurs invoquent leur « science » d’historien ou de sociologue, alors qu’ils tiennent manifestement des propos idéologiques et militants.

Débat d’idées oui, attaques personnelles non.

Henri Peña-Ruiz



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