Rapport de la "Commission Stasi" (11 déc. 03)

Commission de réflexion sur l’application du principe de laïcité dans la République 2005

Source : La Documentation française.

"La laïcité ne saurait se réduire à la neutralité de l’Etat. Respect, garantie, exigence, vivre ensemble en sont les principes cardinaux ; ils constituent un ensemble de droits et de devoirs pour l’Etat, les cultes et les personnes.

[...] Dans la conception française, la laïcité n’est pas un simple « garde-frontière » qui se limiterait à faire respecter la séparation entre l’Etat et les cultes, entre la politique et la sphère spirituelle ou religieuse. L’Etat permet la consolidation des valeurs communes qui fondent le lien social dans notre pays.

[...] Nier la force du sentiment communautaire serait vain. Mais l’exacerbation de l’identité culturelle ne saurait s’ériger en fanatisme de la différence, porteuse d’oppression et d’exclusion. Chacun doit pouvoir, dans une société laïque, prendre de la distance par rapport à la tradition. Il n’y a là aucun reniement de soi mais un mouvement individuel de liberté permettant de se définir par rapport à ses références culturelles ou spirituelles sans y être assujetti.

[...] La question de la laïcité est réapparue en 1989 là où elle est née au XIXème siècle : à l’école. Sa mission est essentielle dans la République. Elle transmet les connaissances, forme à l’esprit critique, assure l’autonomie, l’ouverture à la diversité des cultures, et l’épanouissement de la personne, la formation des citoyens autant qu’un avenir professionnel. Elle prépare ainsi les citoyens de demain amenés à vivre ensemble au sein de la République. Une telle mission suppose des règles communes clairement fixées. Premier lieu de socialisation et parfois seul lieu d’intégration et d’ascension sociale, l’école influe très largement sur les comportements individuels et collectifs. A l’école de la République sont accueillis non de simples usagers, mais des élèves destinés à devenir des citoyens éclairés. L’école est ainsi une institution fondamentale de la République, accueillant pour l’essentiel des
mineurs soumis à l’obligation scolaire, appelés à vivre ensemble au-delà de leurs différences. Il s’agit d’un espace spécifique, soumis à des règles spécifiques, afin que soit assurée la transmission du savoir dans la sérénité. L’école ne doit pas être à l’abri du monde, mais les élèves doivent être protégés de la « fureur du monde » : certes elle n’est pas un sanctuaire,
mais elle doit favoriser une mise à distance par rapport au monde réel pour en permettre l’apprentissage. Or dans de trop nombreuses écoles, les témoignages ont montré que les conflits identitaires peuvent devenir un facteur de violences, entraîner des atteintes aux libertés individuelles et provoquer des troubles à l’ordre public. Le débat public s’est centré sur le port du voile islamique par de jeunes filles et plus largement sur le port de signes religieux et politiques à l’école.

[...] La commission, après avoir entendu les positions des uns et des autres, estime qu’aujourd’hui la question n’est plus la liberté de conscience, mais l’ordre public. Le contexte a changé en quelques années. Les tensions et les affrontements dans les établissements autour de questions religieuses sont devenus trop fréquents. Le déroulement normal des enseignements ne peut plus être assuré. Des pressions s’exercent sur des jeunes filles mineures, pour les contraindre à porter un signe religieux. L’environnement familial et social leur impose parfois des choix qui ne sont pas les leurs. La République ne peut rester sourde au cri de détresse de ces jeunes filles. L’espace scolaire doit rester pour elles un lieu de liberté et d’émancipation.

C’est pourquoi la commission propose d’insérer dans un texte de loi portant sur la laïcité la disposition suivante :

"Dans le respect de la liberté de conscience et du caractère propre des établissements privés sous contrat, sont interdits dans les écoles, collèges et lycées les tenues et signes manifestant une appartenance religieuse ou politique. Toute sanction est proportionnée et prise après que l’élève a été invité à se conformer à ses obligations".

Cette disposition serait inséparable de l’exposé des motifs suivant :

" Les tenues et signes religieux interdits sont les signes ostensibles, tels que grande croix, voile ou kippa. Ne sont pas regardés comme des signes manifestant une appartenance religieuse les signes discrets que sont par exemple médailles, petites croix, étoiles de David, mains de Fatimah, ou
petits Coran."

Cette proposition a été adoptée par la commission à l’unanimité des présents moins une abstention.

Elle doit se comprendre comme une chance donnée à l’intégration. Il ne s’agit pas de poser un interdit mais de fixer une règle de vie en commun.

[...] Dans le monde de l’entreprise, le Kippour, l’Aïd-el-kébir, le Noël orthodoxe ou des chrétiens orientaux seraient reconnus comme jours fériés. Ils seraient substituables à un autre jour férié à la discrétion du salarié. Cette proposition serait définie après concertation avec les partenaires sociaux, et en tenant compte des spécificités des petites et moyennes entreprises."

Voir Rapport de la Commission de réflexion sur l’application du principe de laïcité dans la République (remis le 11 décembre 2003).



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