Note de lecture

R. Gary - Flamboyant de désespoir (S. Mayol)

par Samuel Mayol. 26 mars 2023

[Les échos "Culture" sont publiés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

Romain Gary (Emile Ajar), La vie devant soi, Mercure de France, 1975, 270 p., 21,80€ ; rééd. Gallimard Folio, 2020, 288 p., 8,50 €.

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Quel plaisir de redécouvrir un livre que j’avais lu il y a de nombreuses années.

Emile Ajar, alias Romain Gary, n’a pas volé son deuxième Prix Goncourt, ce roman est flamboyant de désespoir, criant de réalisme, délirant d’humour, un condensé de vie, la vie devant soi, celle de Momo, de tous ces enfants perdus, en manque d’amour et de reconnaissance.

Ce livre aborde un thème récurrent dans la littérature française : un enfant arabe voue une infinie tendresse à une vieille dame… juive.

Quartier de Belleville, années 1970. Momo, 10 ans, vit chez Madame Rosa, une ancienne prostituée qui a créé « une pension sans famille pour les gosses qui sont nés de travers », c’est à dire qu’elle accueille des enfants de prostituées pour les protéger de l’assistance publique ou des "proxinètes", comme dit Momo.

Le jeune garçon raconte son quotidien à hauteur d’enfant émaillant son récit de réflexions sur la vie : « Les gens tiennent à la vie plus qu’à n’importe quoi, c’est même marrant quand on pense à toutes les belles choses qu’il y a dans le monde », « La vie fait vivre les gens sans faire tellement attention à ce qui leur arrive. »

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Si Momo a la vie devant lui, Madame Rosa, quant à elle, est hantée par ses souvenirs d’Auschwitz, se laissant gagner peu à peu par la maladie. Son médecin insiste pour qu’elle soit hospitalisée ; elle refuse catégoriquement, soutenue par Momo : « Moi je trouve qu’il n’y a pas plus dégueulasse que d’enfoncer la vie de force dans la gorge des gens qui ne peuvent pas se défendre et qui ne veulent plus servir. »

L’enfance, la mort, la vieillesse, le milieu des prostituées et des émigrés s’entremêlent savamment pour former une œuvre atypique, pimentée de trouvailles langagières hors norme, drôles et décalées.

Les derniers mots du roman sonnent comme une promesse : « Il faut aimer. »

Samuel Mayol



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