Comité Laïcité République

Pourquoi le manifeste "Quatorze mesures pour une laïcité libératrice" ? (J.-P. Sakoun, 8 mars 19)

par Jean-Pierre Sakoun, président du CLR. 8 mars 2019

La laïcité nourrit le débat politique et social français depuis la première affaire du voile au collège, en 1989 [1]. En trente ans, des dizaines d’ouvrages, des milliers d’articles ont été publiés à un rythme de plus en plus rapide sur le sujet. Beaucoup n’ont servi qu’à semer la confusion dans les esprits. Aujourd’hui le principal danger qui menace la laïcité, c’est qu’elle est souvent mal comprise, quand elle n’est pas volontairement dénigrée.

Il est bien normal que ce principe constitutionnel, clé de voûte de la République, devenu en un peu plus d’un siècle une valeur culturelle partagée par l’immense majorité des Français, nous préoccupe à ce point, lorsque tant de forces convergent pour l’affaiblir, le vider de sa substance, le détourner, voire le liquider.

La laïcité, ce principe sans lequel les valeurs de Liberté, d’Égalité et de Fraternité ne seraient qu’incantations, est une promesse exigeante. Elle dévoile pour chacun un horizon de liberté, d’émancipation et de respect des autres et de soi-même ; elle assure à tous l’égalité devant la loi et la solidarité de la Nation. Mais elle demande à chacun – elle exige même – un engagement désintéressé. Elle veut que chacun se grandisse.

Un tel idéal heurte frontalement toutes les fausses évidences de l’époque, la doctrine néolibérale et son individualisme forcené, les communautarismes qui tribalisent et essentialisent les êtres humains, les intégrismes religieux qui les soumettent et les radicalisent, les théories séparatistes qui ne voient plus en chacun d’entre nous que la particularité de sa race, de sa couleur, de son ethnie, de sa sexualité, de sa foi.

Ce mélange destructeur a déjà accompli son œuvre à travers les attentats des fanatiques islamistes qui ont tué journalistes, juifs, représentants de l’ordre, citoyens dans tout le pays. C’est alors seulement que beaucoup ont pris conscience de la menace qui pèse sur notre liberté, tant la laïcité semblait jusque-là un acquis éternel et indiscutable. Pourtant les Français, imprégnés de l’idéal laïque, n’ont pas répondu par la haine à cette violence mortifère et n’ont pas pratiqué les amalgames dont certains agitent la menace pour éviter d’affronter les véritables problèmes.

Si notre laïcité a ainsi démontré sa force et la profondeur de son enracinement dans le peuple français, ce que tous les sondages confirment depuis une décennie, nous sentons pourtant qu’elle est ébranlée par le déchaînement de violence de ses adversaires.

Les derniers mandats présidentiels n’ont pas rassuré les laïques épris d’émancipation. L’opportunisme et les jugements de valeur d’un président de droite, les atermoiements d’un président de gauche, les ambiguïtés du président actuel, tout cela n’est pas fait pour renforcer la laïcité qui seule est à même de garantir la paix civile dans le pays de la passion politique.

Aussi quand le président de la République envisage de réviser la Loi de séparation des Eglises et de l’Etat du 9 décembre 1905 qui fonde le principe de laïcité et qu’il interpelle les Français sur ce sujet dans le cadre du « Grand débat national », les laïques et républicains sincères doivent lui répondre.

Le Comité Laïcité République (CLR), association humaniste, tisse sans cesse depuis trente ans les liens de la laïcité entre les représentants de toutes les tendances politiques républicaines. C’est pourquoi nous avons voulu soumettre aux citoyens français sous la forme d’un manifeste des propositions dont l’application permettrait de conforter l’idéal émancipateur de la République et de rétablir la fraternité universelle.

Le Manifeste que nous proposons se veut donc une réponse aux questions sur la laïcité posées dans la « Lettre aux Français ». Il vient compléter l’Appel des 113 à ne pas modifier la Loi de 1905, dont le CLR est signataire [2]. Il énumère quatorze mesures, pour renforcer les institutions, pour affermir le rôle de l’école, creuset de la citoyenneté et pour promouvoir une société plus fraternelle.

C’est par la défense, l’extension et l’affirmation des libertés laïques que les démons extrémistes, racistes, antisémites qui ne cessent de hanter notre société depuis un quart de siècle, seront vaincus.

Jean-Pierre Sakoun
Président,
pour le Comité Laïcité République.

Voir aussi 14 mesures pour une laïcité libératrice (8 mars 2019).


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