Revue de presse

N. Bouzou : "L’économie selon Houellebecq et Onfray" (L’Express, 19 jan. 23)

Nicolas Bouzou, économiste. 22 janvier 2023

[Les éléments de la Revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

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Lire "L’économie selon Houellebecq et Onfray, par Nicolas Bouzou".

""Le déclin de l’Occident ?" C’est ce titre sous forme de fausse question qui chapeaute le désormais célèbre entretien publié dans Front populaire entre son fondateur Michel Onfray et Michel Houellebecq. La polémique s’est concentrée sur les saillies du grand écrivain concernant les musulmans mais nos deux joyeux débatteurs visent bien d’autres cibles : l’Otan (dont Michel Onfray veut sortir, en effet c’est vraiment le moment) ; le général de Gaulle (dont Houellebecq aurait souhaité qu’il fut passé par les armes pour avoir laissé tomber les harkis) et l’Union européenne, objet de détestation commun aux deux Michel.

L’un des moments les plus délirants de l’entretien concerne la possibilité d’un Frexit, dont Onfray soutient qu’il serait techniquement assez simple. Sur ce sujet, le philosophe cite Jacques Sapir, un économiste qui semble passer une grande partie de sa journée sur Twitter à relayer les éléments de langage du Kremlin, et Jean-Luc Mélenchon dont chacun connaît la justesse des analyses économiques. L’effondrement du Venezuela en témoigne. Pour les duettistes, les problèmes économiques de la France sont liés à germanisation de notre pays et à l’américanisation de l’Europe, sans que ces notions soient précisément définies. Onfray excelle dans son analyse complotiste de l’Union européenne, édifiée selon lui par un Jean Monnet payé par la CIA dans le but de vassaliser les pays de notre continent. Résultat ? Pour Houellebecq, "les Français n’aiment pas l’Europe, mais ils ont peur de quitter l’euro tout simplement parce qu’ils manquent de confiance en eux". [...]

Déclin de la France à cause de l’Europe et, comme suggéré dans le titre de l’entretien, déclin de l’Occident. Comme le remarquent les deux compères, ce déclin se lit dans des chiffres de fécondité particulièrement bas. Pour Houellebecq, la modernité occidentale s’autodétruit. Les deux écrivains sont tout de même saisis d’un éclair de lucidité quand ils remarquent que la Russie ou la Chine subissent elles aussi un déclin démographique accéléré. L’Inde en prend le chemin. Mystère… Ils oublient tous deux (ou ignorent) la loi robuste de la transition démographique : le taux de fécondité évolue inversement au revenu par habitant. L’enrichissement des parents les conduit à faire moins d’enfants. L’éducation et le bien-être des enfants sont préférés à la quantité, signe, non pas de déclin mais de progrès.

Houellebecq déteste l’Occident et pense que ses valeurs font que notre civilisation ne mérite pas d’être sauvée. Il risque d’être déçu. Car la première leçon des années difficiles que nous traversons, c’est que l’Occident fait montre d’une capacité de résilience qui étonne partout dans le monde. [...]"


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