Mission parlementaire sur le voile intégral : intervention de Philippe Foussier (16 sept. 09)

Président du Comité Laïcité République 17 septembre 2009

Le CLR a été fondé dans la foulée de la première affaire du voile, de Creil, en 1989, et sur les bases de l’appel aux enseignants « Profs ne capitulons pas ! » lancé par Elisabeth Badinter, Elisabeth de Fontenay, Catherine Kintzler, Régis Debray et Alain Finkielkraut.

Cette association, qui a bientôt 20 ans, compte parmi son comité fondateur des personnalités comme Henri Caillavet, Maurice Agulhon, Pierre Bergé, Fanny Cottençon, Max Gallo, Gisèle Halimi, Albert Memmi, Claude Nicolet, Jean-Claude Pecker, Yvette Roudy, mais aussi, déjà cités, Régis Debray, Alain Finkielkraut Elisabeth Badinter et Catherine Kintzler.

Elle remet tous les deux ans un Prix de laïcité à deux lauréats, l’un national l’autre international. C’est ainsi qu’en 2009, le Jury, présidé par le Pr Jean Pierre Changeux, a distingué le scientifique Guillaume Lecointre et la journaliste libanaise Nadine Abou Zaki. En 2007, le Jury présidé par Antoine Sfeir distinguait notamment le député danois Nasser Khader, celui que présidait Christian Bataille en 2005 avait sélectionné Caroline Fourest, et en 2003, le jury présidé par Elisabeth Badinter avait décerné le Prix national à Fadela Amara et le Prix international à Chahdortt Djavann.

Nous organisons des diners débat ou des échanges, à Paris comme en province grâce à l’implantation de nos divers comités locaux, et, si le thème de la laïcité est bien entendu notre axe central de réflexion et d’action, nous nous intéressons aussi de près aux questions touchant à la citoyenneté, à l’école, au racisme, aux dimensions éthiques des débats scientifiques et, on le distingue à travers les Prix de la laïcité, au combat pour le droit des femmes et pour l’égalité entre les femmes et les hommes. C’est pour nous un engagement majeur, et c’est sans doute davantage pour cette raison que nous sommes ici aujourd’hui que pour un enjeu strictement laïque. Bien entendu, le port de la burqa nous interpelle parce qu’il renvoie au débat sur la revendication de droits différenciés, parce qu’il fait écho à la montée des communautarismes, mais surtout parce qu’il nous semble d’abord une illustration emblématique d’un retour en arrière s’agissant des droits et de la dignité de la femme dans notre société.

Cela nous avait déjà conduits dans le passé à intervenir fortement pour appuyer le vote de la loi proscrivant les signes religieux à l’école, et nous avions été auditionnés alors par la commission Stasi ; nous nous sommes félicités du vote alors quasi unanime du Parlement de cette loi qui a démontré, loin des prévisions alarmistes énoncées alors, qu’elle était une loi de pacification, de clarification, de soutien aux responsables d’établissements scolaires et de rappel à la règle commune. Nous comptons dans nos rangs bien entendu des agnostiques ou des athées, mais aussi une proportion significative de croyants et de pratiquants des grandes religions monothéistes et notre action n’est en rien dirigée contre la foi, que nous respectons. En revanche, tous nos adhérents sont attachés à une conception de la laïcité qui n’a besoin d’aucun adjectif pour être définie, la loi de Séparation de 1905 établissant un compromis qui permet à chacun d’exercer sa foi ou non et de préserver la paix civique dans l’espace public.

Pour aborder précisément la question qui nous est posée à travers les réflexions de votre mission parlementaire, le CLR se prononce plutôt en faveur d’une loi, sauf si la législation actuelle permet de proscrire le port de la burqa, ce que certains juristes avancent.

« Entre le fort et le faible, c’est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit » disait Lacordaire. Nous reprenons volontiers cette formule à notre compte pour dire que les principes républicains comme l’indispensable égalité de droit et de dignité entre l’homme et la femme nécessitent des règles définies par le législateur, garant de l’intérêt collectif. « Marianne ne peut être voilée », affirmait l’un des vôtres lors du débat sur les signes religieux à l’école. A fortiori, Marianne ne peut être engrillagée. Si un dispositif législatif doit être envisagé, il doit aussi être accompagné d’un effort de pédagogie, notamment pour qu’à l’école on mette enfin l’accent sur ce qui rassemble tous les êtres humains qu’elle que soit leur couleur de peau, leur origine ethnique ou religieuse plutôt qu’en valorisant et en accentuant les divergences, ce qui concoure inévitablement à détruire le contenu même de la citoyenneté.


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