Revue de presse

M. Schiappa : "Le féminisme n’est ni une secte ni une marque déposée" (liberation.fr , 6 sep. 18)

Marlène Schiappa, secrétaire d’Etat chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes. 10 septembre 2018

[Les articles de la revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

"Fallait-il inviter Raphaël Enthoven ou Elisabeth Lévy aux premières Universités d’été du féminisme, organisées par le gouvernement ? Marlène Schiappa répond à une tribune parue lundi dans « Libé ».

Chère Madame Domenach,

Il est une chose à laquelle je ne m’habituerai jamais dans la responsabilité politique : que des gens que vous connaissez et parfois estimez ne vous parlent pas quand ils ont un désaccord, mais appellent un titre de presse pour publier une tribune. Puisque c’est le format que vous choisissez, je vous prie de trouver ma réponse dans Libération.

« Les grands esprits discutent des idées, les esprits moyens discutent des événements, les petits esprits discutent des gens. » (Eleanor Roosevelt).

En chacun de nous, ces trois esprits cohabitent. L’enjeu : quel genre d’esprit voulons-nous développer ? Vous vous offusquez de la présence annoncée de trois personnes à la Première Université d’été du féminisme les 13 et 14 septembre à la Maison de la radio : Raphaël Enthoven, Elisabeth Lévy, Peggy Sastre. Je m’étonne d’abord que vous décidiez de retenir trois noms sur cinquante et, brandissant ces noms que vous avez jugés disqualifiés, décidiez de disqualifier l’ensemble du débat. La cinéaste Lisa Azuelos, l’ambassadrice du Canada Isabelle Hudon, la philosophe Martine Storti, l’historienne Michelle Perrot, les journalistes Isabelle Germain et Nadia Daam, la secrétaire générale du Conseil supérieur de l’égalité professionnelle Brigitte Grésy, la consultante Marie Donzel, la présidente du Global Summit of Women Irene Natividad, les artistes engagés Tristan Lopin ou Noémie De Lattre pour n’en citer que quelques-uns ne méritent-ils pas l’écoute à vos oreilles sous prétexte que Raphaël Enthoven est dans la salle ? Je suis en désaccord politique avec certaines, dois-je les radier de tout débat public comme vous le demandez ? Ou dois-je par avance me désolidariser de ce que chacun dira - doivent-ils le faire pour moi ? Quelle étrange conception ce serait du débat, de la discussion, de la nuance… que de ramener tout à « blanc-noir », à des lignes de personnes.

Je réfute ce débat de personnes et refuse de radier de la liste ceux que vous nommez. Je ne vais pas ici copier-coller leur CV ou argumenter leur légitimité à débattre. Je vais vous parler de conception du débat. Parce que je ne prétends pas détenir la vérité, unique et révélée. Parce que dans un débat sur #Balancetonporc il me semble intéressant d’écouter ce que les opposantes ont à dire - ne serait-ce que si vous voulez savoir ce que vous contredisez. Féministe de gauche, je réfute les assignations à résidence politique - c’est ce qui m’a conduite à En marche. Je ne suis pas en charge au gouvernement des féministes de gauche seulement, mais de l’égalité - et je ne fais de rien une affaire personnelle. Quelle que soit mon opposition politique avec des invités : ils ont le droit à la parole.

Cette Université d’été sera aussi l’occasion de rencontrer des associations féministes. En avant toute(s), FDFA, la FNSF 3919, Collectif féministe contre le viol, CNIDFF, le Planning familial, Femmes solidaires… Moins de 9 % de la population française a le réflexe de se tourner vers elles en cas de violences. Peu sont en capacité de les citer. C’est mon travail de faire venir des gens à leur rencontre. C’est ce que je fais.

Il n’y a pas de « féminisme, mais » - comme il n’y a pas de « laïcité, mais ». Il n’y a pas non plus de « féminisme et tais-toi ». Le féminisme n’est ni une secte ni une marque déposée. Il est traversé par différents débats. Je ne suis pas en charge de l’attribution des brevets de féminisme mais de la conduite de politiques publiques d’égalité entre les femmes et les hommes et, dans ce cadre, mission m’est confiée au gouvernement d’amener toute la société dans le débat. C’est ce que je fais. Faire du féminisme un épouvantail ou un club recroquevillé sur lui-même ne m’apparaît pas efficace - c’est mon point de vue, il peut se débattre comme tout point de vue.

S’il s’agit de simplement proclamer « Nous devons toutes être féministes ! » nul besoin de débat, ni de moi ni de vous - un tee-shirt Dior [1] ou un panneau lumineux dans un clip de Beyoncé font ça très bien. S’il s’agit de réfléchir, d’argumenter, de confronter des pensées et d’agir : venez aux Universités d’été du féminisme et débattons de l’événement, ou mieux : débattons des idées."

Lire "Le féminisme n’est ni une secte ni une marque déposée".

[1Référence au tee-shirt Dior « We Should All Be Feminists ».


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