Revue de presse

Le nouveau guide de la laïcité à l’école "tranche différentes situations qui cristallisent les passions" (lavie.fr , 31 mai 18)

31 mai 2018

"Menu à la cantine, absence pour fête religieuse, contestation d’un enseignement... Le nouveau guide de la laïcité à l’école aborde sans tabou toutes les questions qui peuvent se poser dans un établissement.

[...] Le vade-mecum détaille de manière structurée et pédagogique des cas concrets qui peuvent se présenter, car « toute atteinte à ce principe constitutionnel nécessite une réponse », précise le document en introduction. « La laïcité garantit la liberté de conscience et protège la liberté de croire, de ne pas croire et de changer de conviction (…) mais chacun doit respecter les principes et valeurs qui sous-tendent une République laïque ». Ni prosélytisme ni propagande religieuse au sein des établissements : « la loi démocratique prime sur les lois religieuses ». Ferme dans le ton, il rappelle que la laïcité est un principe non négociable, toute infraction appelant à des « sanctions ».

Pour autant, la ligne de crête est préservée puisque le vade-mecum ne porte pas atteinte au respect de la liberté de croire.

Au vu des cas concrets abordés, inutile d’être grand clerc pour avancer que l’école républicaine cherche à (re)cadrer la pratique des élèves musulmans : tenue vestimentaire, menu à la cantine, dispense de piscine, etc. Le devoir de neutralité des personnels du service public est également rappelé, s’appuyant sur le document « Laïcité et fonction publique ». Ainsi, le refus de saluer certains collègues est proscrit ; refuser l’autorité de sa supérieure hiérarchique parce qu’elle est une femme est un cas caractérisé de refus d’obéissance. Quant aux enseignants, soumis au principe de neutralité comme tous les agents publics, ils ne peuvent davantage « manifester leurs croyances religieuses ».

Pour autant, la ligne de crête est préservée puisqu’il ne porte pas atteinte au respect de la liberté de croire. Par exemple, lors d’un voyage scolaire, « les conditions de la liberté de culte doivent être assurées, mais ne doivent pas heurter la liberté de conscience des autres élèves ». En cas de non fréquentation de la cantine pour motif religieux pendant un certain laps de temps, « la collectivité peut, si elle l’estime opportun, prévoir ce motif de remboursement et d’exonération des frais de cantine. » Quel que soit le motif abordé, le dialogue préalable reste de mise. Le chef d’établissement recevra l’élève et ses parents afin de rappeler les règles et de déterminer l’intention : simple méconnaissance ou volonté délibérée de déroger au principe de laïcité.

Ce vade-mecum tranche différentes situations qui cristallisent les passions. Nous avons imaginé sept questions qui peuvent se poser et les réponses qui pourraient être apportées, en s’appuyant sur le document.

1. Peut-on porter sa médaille de baptême à l’école ?
Réponse : oui, si elle ne fait pas la taille d’une croix pectorale épiscopale. La loi ne remet pas en cause le droit des élèves de porter des signes religieux discrets. En revanche, certains signes et tenues « dont le port conduit à se faire immédiatement reconnaître par son appartenance religieuse » sont interdits, tels que « le voile dit islamique, quel que soit le nom qu’on lui donne, la kippa, le turban sikh, le bindi hindou ou une croix de dimension manifestement excessive ».

2. Un élève a-t-il le droit de contester un enseignement ?
Réponse : non. Le vade-mecum énumère différents sujets sensibles : histoire des génocides, histoire des religions, origine de la vie, théorie de l’évolution, éducation à la sexualité, égalité filles-garçons, enseignement du fait religieux… « Les élèves n’ont pas le droit de s’opposer à un enseignement en raison de leurs convictions religieuses. Ils ne peuvent pas non plus, au nom de considérations religieuses ou de toute autre considération, contester le droit d’un professeur, parce que c’est un homme ou une femme, d’enseigner certaines matières, ou encore le droit d’une personne n’appartenant pas à leur confession de faire une présentation de tel ou tel fait historique ou religieux ». La question de l’éducation à la sexualité est notamment développée, par le prisme d’une vision égalitaire des sexes. La question des grossesses précoces et celle des maladies sexuellement transmissibles sont aussi abordées.

3. Est-il possible qu’un élève soit dispensé de piscine, de la visite d’une église ou d’un lieu de commémoration de la Shoah ?
Réponse : non. Pas de billets d’absence injustifiés : « un absentéisme sélectif pour des raisons religieuses ne saurait être accepté. En éducation physique et sportive (EPS), les certificats médicaux – qui pourraient apparaître de complaisance –peuvent être soumis au contrôle du médecin scolaire académique. » Par ailleurs, « toutes les activités organisées dans le cadre de ces sorties (visite patrimoniale d’un site religieux ou historique, etc.) s’imposent à l’élève ».

4. Puis-je faire manquer à mon enfant le Vendredi saint, le jour du Kippour ou de l’Aïd ?
Réponse : oui. « Les élèves sont soumis à l’obligation d’assiduité prévue à l’article L. 511-1 du Code de l’éducation. Toutefois, cette obligation ne s’oppose pas à ce que des autorisations d’absence soient accordées à des élèves qui en font la demande lorsqu’elles concernent une grande fête religieuse dont la liste restreinte est arrêtée chaque année. » Il s’agit donc d’une journée annuelle, accordée à titre exceptionnel qui ne saurait être systématisée, et pourrait être refusée en cas d’incompatibilité avec les exigences de la scolarité.

5. Le menu à la cantine peut-il tenir compte des prescriptions religieuses ?
Réponse : à la discrétion des collectivités territoriales. « Prévoir des menus distincts convenant aux pratiques confessionnelles des élèves ne constitue ni un droit pour les usagers, ni une obligation pour les collectivités territoriales », relève le document. Un panier-repas pour l’enfant, prévu par les parents, n’est autorisé que sur motif médical. À l’égard de cette question épineuse, le gouvernement laisse le soin aux collectivités territoriales de trancher. Ces dernières sont en effet libres de proposer des repas différenciés. À charge pour l’établissement d’éviter le regroupement d’élèves par tables et d’éventuelles pressions entre eux.

6. Peut-on installer une crèche à Noël dans une école publique ?
Réponse : non, sauf à titre d’exposition. En effet, l’article 28 de la loi de 1905 de séparation de l’Eglise et de l’Etat assure « la neutralité à l’égard des cultes des édifices publics, s’oppose à l’installation, dans un bâtiment affecté à un service public ou dans un emplacement public, d’un signe ou emblème manifestant la reconnaissance d’un culte ou marquant une préférence religieuse ». Le sapin seul pourra être toléré, dans la mesure où il est devenu le « symbole d’une fête largement laïcisée », mais « à condition qu’il ne revête aucun caractère cultuel dans sa présentation ou dans sa décoration ». Pas d’angelots ni de crèche miniature suspendus à sa ramure.

7. Une mère d’élève peut-elle accompagner une sortie voilée ?
Réponse : oui. Ces dispositifs concernent les élèves lorsqu’ils sont dans l’enceinte de l’établissement. Par conséquent, « les parents d’élèves peuvent entrer dans l’établissement scolaire alors qu’ils portent un signe ou une tenue manifestant ostensiblement une appartenance religieuse. » Idem pour accompagner une sortie, sauf sur demande préalable du chef d’établissement, dont il sera juge au cas par cas. Dans le même esprit, « ces dispositions ne s’appliquent pas aux candidats qui ne sont pas scolarisés dans l’enseignement public et qui viennent passer les épreuves d’un examen ou d’un concours dans les locaux d’un établissement public d’enseignement ». Les élèves scolarisés dans l’enseignement privé (sous contrat et hors contrat) et les candidats pourront donc franchir le seuil de l’établissement public pour leur examen dans la tenue qui leur chante. Sous réserve toutefois que leur identité puisse être établie."

Lire "Cap sur la laïcité à l’école".



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