24 juillet 2022
[Les éléments de la revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]
"Le milliardaire breton Vincent Bolloré aura-t-il plus de succès avec l’ultraconservateur cardinal Robert Sarah qu’il en a eu avec le polémiste multicondamné Éric Zemmour, soutenu par ses médias pendant la campagne présidentielle ? En tout cas, l’affaire, la semaine dernière, a fait grand bruit.
Par Bernadette Sauvaget
Bien identifié dans les milieux catholiques réactionnaires – en particulier français – mais presque inconnu du grand public, Robert Sarah a été propulsé à la une de l’hebdomadaire Paris Match, posant en soutane dans les jardins du Vatican le regard portant vers le lointain. Ou l’avenir ? En interne, ce choix éditorial a suscité la colère de la rédaction en chef, qui a tenté en vain de faire changer cette une auprès de sa direction. Et l’émoi de la société des journalistes (SDJ), qui a perçu, sûrement à raison, une volonté de mainmise de Vincent Bolloré, connu pour être un catholique très conservateur. La une de Paris Match, selon la SDJ, « ne correspond pas à la ligne éditoriale du journal et nous semble, en ce début d’été, être un choix périlleux susceptible de déboussoler nos lecteurs et de les détourner de notre magazine ». La rédaction s’inquiète aussi de ce « que les positions les plus controversées du cardinal Sarah aient été passées sous silence ».
Le portrait de Sarah est écrit par Philippe Labro, un proche de Vincent Bolloré – ce qui laisse peu de doute sur le commanditaire de l’opération – et non par la fameuse vaticaniste de Match, Caroline Pigozzi, une proche du pape François. Dans son style, l’article relève surtout du genre hagiographique, sorte de success story d’un enfant guinéen pauvre, né dans la brousse, qui pourrait peut-être encore devenir pape. En tout cas, la une du magazine ressemble à s’y méprendre à un début de campagne pour refaire du cardinal Sarah un « papabilable » présentable. Selon les spécialistes à Rome, le Guinéen, l’un des chefs de file de l’opposition au pape, a en effet brûlé ses vaisseaux ces dernières années du fait de ses positions de plus en plus extrémistes. La polémique avait été très vive, en janvier 2020, après la parution du livre Des profondeurs de nos cœurs, cosigné dans un premier temps avec le pape émérite Benoît XVI, qui visait à combattre l’ordination d’hommes mariés.
Ces derniers mois, Robert Sarah a bénéficié d’un soutien de plus en plus marqué des médias appartenant au milliardaire breton. Il a ainsi été invité sur la radio Europe 1 et sur la chaîne de télévision CNews. Le prélat, à la retraite de ses fonctions à la curie romaine depuis qu’il a atteint ses 75 ans – son mandat, contrairement à ceux d’autres cardinaux, n’a pas été prolongé –, est un familier de l’Hexagone. Il y tient régulièrement des conférences dans le cadre de tournées de promotion de ses livres. Il séjourne assez souvent aussi à l’abbaye de Lagrasse (Aude), où la liturgie est célébrée en latin. Violemment opposé aux droits LGBT, Sarah soutient de plus en plus clairement les milieux traditionalistes dans leur combat contre le motu proprio Traditionis custodes, qui a réduit l’usage de la messe en latin et ouvert un conflit avec François."
Voir aussi dans la Revue de presse "La rédaction de « Paris Match » dénonce sa « une » sur un cardinal ultra-conservateur" (AFP, lemonde.fr , 6 juil. 22), "Bolloré gave ses téléspectateurs avec la soupe indigeste du cardinal Robert Sarah" (charliehebdo.fr , 27 déc. 21) dans Médias et religions dans Médias (note du CLR).
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