Revue de presse

J.-M. Sauvé : « Pourquoi le Conseil d’État a autorisé le burkini » (lefigaro.fr , 4 oct. 16)

Jean-Marc Sauvé, vice-président du Conseil d’Etat. 26 octobre 2016

[Les éléments de la revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

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"[...] La question qui lui était soumise était de savoir comment concilier deux grands principes. D’une part, le respect de libertés garanties par la loi, telles que la liberté de conscience, la liberté d’aller et venir sur une plage et la liberté personnelle : celle de se vêtir comme on l’entend. D’autre part, la prévention des atteintes à l’ordre public. Le Conseil d’État a rappelé dans ses décisions que les mesures de police prises par le maire doivent être « nécessaires, adaptées et proportionnées au regard des seules nécessités de l’ordre public ». Le maire ne peut pas se fonder sur d’autres considérations. Le Conseil d’État n’a relevé aucun risque avéré d’atteinte à l’ordre public à Villeneuve-Loubet ni à Cagnes-sur-Mer. Il a donc suspendu les mesures d’interdiction du burkini.

Le Conseil d’État aurait-il pu prendre une décision inverse, en s’appuyant sur d’autres principes fondamentaux comme l’égalité entre hommes et femmes ou la dignité de la personne humaine ? N’aurait-il pas dû considérer que le burkini n’est pas un maillot de bain comme un autre ?

La notion d’ordre public a deux composantes. L’une, très concrète : c’est la prévention des atteintes aux personnes et aux biens. L’autre, qui touche plus aux principes, recouvre la notion de dignité humaine. C’est elle qui a justifié l’interdiction d’un spectacle de lancer de nain ou d’un spectacle à caractère antisémite. Mais cette idée d’ordre public enraciné dans les principes n’a vocation à s’appliquer que dans des situations univoques et extrêmement graves, ce qui était le cas de l’apologie de la Shoah dans le spectacle de Dieudonné. Or, le port d’un vêtement ne peut être regardé comme portant par lui-même atteinte à l’égalité entre hommes et femmes. [...]

Par le passé, le Conseil d’État s’est opposé à la loi sur le voile à l’école puis à celle interdisant la burqa dans l’espace public. A-t-il historiquement tort ?

La répétition d’erreurs n’a jamais fait une vérité. Le Conseil d’État ne s’est pas opposé à la loi de 2004 sur l’interdiction des signes religieux à l’école. Consulté en 1989 par le gouvernement sur le port du foulard à l’école, il l’a éclairé sur ce qu’il était alors possible de faire, à droit constant, et donc sans loi. En 2004, le Conseil d’État a joué un rôle déterminant dans l’adoption de la loi sur l’interdiction des signes religieux à l’école par le biais de la participation de certains de ses membres à la commission Stasi. Il a ensuite donné un avis favorable au projet de loi. Quant à la burqa, il a certes émis un avis négatif sur son interdiction générale et absolue, mais il s’est fondé sur une analyse juridique des textes existants, et non sur l’opportunité de l’interdiction. [...]

La question du burkini doit-elle finalement se régler par une loi ?

Il appartient au législateur, s’il le juge utile, de se prononcer sur ce sujet. Tout ce que je peux dire est que la voie est très étroite pour limiter, dans le respect de la Constitution et de nos traités, des libertés aussi essentielles que la liberté de conscience ou la liberté de se vêtir afin de réglementer le port d’un costume de bain. [...]"

Lire "Jean-Marc Sauvé : « Pourquoi le Conseil d’État a autorisé le burkini »".



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