Note de lecture

J. Birnbaum : Nos ennemis, eux, ne doutent pas (Ph. Foussier)

par Philippe Foussier. 22 mars 2019

Jean Birnbaum, La Religion des Faibles. Ce que le djihadisme dit de nous, Seuil, 2018, 284 p., 19 euros.

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Directeur du Monde des livres, Jean Birnbaum est l’auteur d’un volume sur le même thème qui avait été salué à juste titre comme un livre important pour comprendre le phénomène djihadiste et la cécité volontaire qu’il provoque chez nombre de nos contemporains (Un silence religieux, Seuil, 2015, cf. Humanisme n° 310, février 2016 [1]). La Religion des Faibles vient prolonger cette réflexion en la situant dans un contexte plus général et actuel. Pour Birnbaum, les Occidentaux sont victimes de leur propre aveuglement. Lorsque les djihadistes martèlent « Nous aimons la mort comme vous chérissez la vie », ceux qui sont visés par cette soif de néant préfèrent regarder ailleurs ou nier cette réalité. Et nous sommes aujourd’hui les « Faibles » tandis que le djihadisme s’affirme sans retenue. Pendant que nous doutons de nous-mêmes, de nos valeurs, nos ennemis, eux, n’éprouvent aucune forme de doute. Ils veulent l’anéantissement de la liberté, de la démocratie, des droits de l’Homme et ils se donnent les moyens d’y parvenir : « Ils nous haïssent pour ce que nous sommes, non pour ce que nous faisons ».

Mais au-delà de leur capacité destructrice explicite par la voie du terrorisme, les djihadistes savent qu’ils peuvent aussi compter sur un terreau fertile pour continuer à semer le doute et la confusion. Car l’Occident lui-même prête le flanc en battant sa coulpe, comme Jean Birnbaum le démontre à l’aide de multiples exemples. Il propose notamment un retour très instructif sur la genèse de l’affaire Rushdie et sur la manière dont l’écrivain avait été, en sus de la fatwa prononcée contre lui par les fous de Dieu, cloué au pilori par une grande partie de l’intelligentsia de gauche. Il revient aussi sur la lâcheté européenne lorsque le Danemark avait été dans l’œil du cyclone après la publication des caricatures du prophète. « Chaque nouveau bain de sang met à nu des réalités, choses banales ou hautes idées dont nous avions oublié à quel point elles structurent nos vies quotidiennes », rappelle Birnbaum.

Philippe Foussier


Ce texte est paru dans Humanisme n°322, fév. 2019 (note du CLR).


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