17 janvier 2015
"Le délit de blasphème a disparu de France en 1789, avec la Déclaration des Droits de l’homme et du citoyen. Mais il perdure en Alsace et en Moselle, dont la réintégration à la France en 1918 s’est faite en conservant certains articles du code pénal allemand. Un jour avant l’attaque mortelle de Charlie Hebdo, les représentants des principaux cultes en Alsace-Moselle, y compris l’islam, demandaient que le délit de blasphème soit abrogé parce que "tombé en désuétude".
Catholiques, protestants, juifs et musulmans alsaciens et mosellans ont fait cette proposition le 6 janvier lors d’une audition commune à Paris devant l’Observatoire de la laïcité, une instance rattachée aux services du Premier ministre. "Cela montre que les cultes sont conscients du caractère excessif d’une telle mesure, et de son caractère attentatoire à la liberté d’expression. Ils nous ont proposé eux-mêmes d’y mettre un terme", selon Nicolas Cadène, le rapporteur général de cet observatoire.
Le blasphème est théoriquement réprimé en Alsace et en Moselle par un article hérité du code pénal allemand dans le cadre du régime dit concordataire qui est une exception à la séparation de l’église et de l’Etat. Jamais été appliqué depuis lors, selon le secrétaire général de l’Institut du droit local alsacien-mosellan, il punit d’un maximum de trois ans de prison "celui qui aura causé un scandale en blasphémant publiquement contre Dieu par des propos outrageants, ou aura publiquement outragé un des cultes".
En 2013, la Ligue de défense judiciaire des musulmans, outrée par une caricature publiée à Une de Charlie Hebdo, avait invoqué le blasphème pour attaquer l’hebdomadaire satirique devant un tribunal strasbourgeois. La procédure avait été déclarée nulle, pour des raisons de forme.
L’archevêque de Strasbourg, Mgr Jean-Pierre Grallet, a confirmé que les représentants des cultes avaient "mûri depuis un certain temps" l’idée de demander l’abrogation de ce délit "obsolète". "La République a suffisamment de moyens pour inviter au respect mutuel", a souligné le responsable catholique. "Nous sommes sur la même ligne. (...) Ce qui nous importe, c’est la liberté d’expression", a dit de son côté Abdellaq Nabaoui, le vice-président du Conseil régional du culte musulman (CRCM) d’Alsace, également auditionné mardi par l’Observatoire de la laïcité. A terme, il reviendrait éventuellement au Parlement de se saisir de ce dossier, pour abroger formellement ce délit, selon l’Institut du droit local."
Lire "En Alsace-Moselle, les cultes veulent abolir le délit de blasphème".
Lire aussi Restons Charlie ! Abrogeons le délit de blasphème sur tout le territoire de la République (14 jan. 15) (note du CLR).
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