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"Canan Arin, avocate et militante des droits des femmes, a été arrêtée le 23 juin dernier pour avoir cité le prophète Mahomet lors d’une conférence sur les mariages forcés.

Co-fondatrice et formatrice au Centre pour la mise en application des droits des femmes de l’association du barreau d’Istanbul, elle intervenait le 4 décembre 2011 lors d’un colloque intitulé « Domaine sur le corps de la femme et les crimes sexuels ». Dans sa présentation sur les mariages forcés et précoces comme forme de violences envers les femmes en Turquie, elle a eu le malheur de donner deux exemples qui ont aussitôt suscité la colère d’une partie du public. Celui du prophète Mahomet, qui a épousé une fillette de sept ans. Et celui du président de la République turque, Abdullah Gül : la première dame actuelle n’avait que 14 ans lors de leurs fiançailles, et 15 au moment de leur mariage. [...]

Canan Arin a été inculpée pour avoir « insulté les valeurs religieuses d’une partie de la population », ce qui est puni par l’article 216/3 du code pénal turc, et pour outrage au président de la République, un délit selon l’article 299/1. L’avocate, dont le procès se poursuit actuellement, dénonce la partialité du système judiciaire, et notamment du procureur qui écrit le sigle « PSSL » (« paix soit sur lui ») dans l’acte d’accusation chaque fois qu’il cite le nom du prophète Mahomet.

En Turquie, l’âge légal pour les mariages est fixé à 17 ans pour les garçons comme pour les filles par le code civil. Cependant, selon l’Institut turc de la statistique, TurkStat, la Turquie compte plus de 181.000 « épouses enfants ». Le taux de consentement des parents aux mariages légaux avant 18 ans a augmenté de 94,2 % en 2011. Pour Canan Arin, la persistance des mariages précoces est liée à la religion. « Certains justifient ces mariages par l’exemple du prophète et font valoir qu’une fille peut être mariée à six ans et le mariage consommé dès qu’elle a ses règles », affirme-t-elle.

En 2011, le ministère de la justice a estimé que le nombre d’assassinats de femmes avait augmenté de 1.400% entre 2002 et 2009. « Le féminicide est endémique en Turquie, déclare Bingul Durbas. Il semble y avoir un lien entre ces deux types de mariages [mariages forcés et mariages précoces] et les soi-disant "crimes d’honneur", ajoute-t-il. Il existe de nombreux cas où les victimes forcées de se marier avant d’avoir atteint l’âge légal ont fini par être tuées, soit parce qu’elles s’étaient enfuies, déshonorant leurs familles, soit qu’elles avaient été renvoyées chez leurs parents par leur mari non officiel qu’elles voulaient quitter après avoir subi des violences extrêmes »."

Lire "Turquie : une avocate accusée d’insulte à l’islam".