Revue de presse

"Le Québec dévoile sa Charte des valeurs" (fait-religieux.com , 11 sept. 13)

12 septembre 2013

"Le gouvernement québecois a présenté mardi 10 septembre sa « Charte des valeurs », avatar de la « charte québécoise de la laïcité » qui figurait au programme du Parti québécois qui a remporté les élections législatives de septembre 2012. Bernard Drainville, ministre responsable des Institutions démocratiques et de la Participation citoyenne, a présenté les cinq propositions du gouvernement en la matière, à savoir :

  • Modifier la Charte québécoise des droits et libertés de la personne
  • Énoncer un devoir de réserve et de neutralité pour le personnel de l’État
  • Encadrer le port de signes religieux ostentatoires
  • Rendre obligatoire le visage à découvert lorsqu’on donne ou reçoit un service de l’État
  • Établir une politique de mise en œuvre pour les organismes de l’État

Comme le révélait le Journal de Montréal le mois dernier, le gouvernement projette bel et bien d’interdire le port des signes religieux aux employés des ministères et des institutions relevant de l’État, notamment les écoles, les universités, les hôpitaux, les corps policiers. Sont également concernés les juges et le personnels des municipalités. Les établissements ne disposant pas de financement publics - garderies ou écoles privées - ne seront pas soumis à la charte ; même chose pour les élus municipaux et les députés.

Les usagers des services publics ne sont pas exclus de la charte, puisqu’il est indiqué qu’ils devront avoir le visage découvert.

Le Canada anglophone n’a pas vu d’un bon oeil cette charte, à l’instar de Denis Lebel, ministre fédéral des Affaires intergouvernementales : « Si une charte est acceptée et passée à l’Assemblée nationale, nous demanderons au ministère de la justice d’en faire l’examen, et si elle viole les protections constitutionnelles auxquelles ont droit tous les Canadiens, nous défendrons ces droits. Partout dans le pays, c’est important pour nous que les gens vivent, soient respectés selon leurs traditions, peu importe où ils sont nés, quelle que soit leur origine, leur race, quelle que soit leur origine ethnique, quelle que soit leur religion, se sentent chez eux dans notre pays [...] et fiers d’être canadiens », a-t-il déclaré.

Le gouvernement Harper se dit préoccupé « par les propositions qui limiteraient le droit de toute personne de pratiquer sa religion » et entend « contester vigoureusement » toute loi qui serait jugée inconstitutionnelle par le ministère de la Justice. [...]

Actuellement, la laïcité n’a rien d’institutionnel au Canada. Le principe de neutralité de l’État est appliqué de façon pragmatique [1], sans qu’une définition claire de la laïcité ait été formulée. Pour remplir ce vide juridique et répondre aux questions du quotidien, notamment dans le monde du travail, la notion « d’accommodement raisonnable » a fait son entrée dans le champ juridique.

Un grand débat concernant la laïcité a eu lieu au Québec en 2007-2008. La commission Bouchard-Taylor, avait alors été chargée d’examiner les questions liées aux accommodements raisonnables. Cette commission a rendu un rapport en 2008 dans lequel l’historien et sociologue Gérard Bouchard et le philosophe Charles Taylor recommandaient d’interdire le port de signes religieux uniquement aux titulaires de fonctions qui doivent incarner la neutralité de l’État, c’est-à-dire les magistrats, procureurs de la Couronne, policiers, gardiens de prison, président et vice-président de l’Assemblée nationale du Québec. En revanche, le rapport recommandait de laisser les enseignants, les fonctionnaires, les professionnels de la santé et tous les autres agents de l’État porter des signes religieux s’ils le souhaitent.

Le mois dernier, juste après la fuite de l’interdiction des signes religieux par le Journal de Montréal, Charles Taylor avait réagi très vivement à cette proposition : « C’est un peu poutinesque ! », a-t-il affirmé à l’agence QMI « les institutions d’un pays doivent être neutres, mais les individus ne sont pas tenus d’être neutres. Ce n’est pas parce qu’on travaille pour le gouvernement qu’on doit mettre ses convictions profondes au vestiaire ! Les individus ont le droit d’être ce qu’ils veulent être, afficher ce qu’ils sont ». Le philosophe avait cité la France comme un contre-exemple en matière de laïcité. [...]"

Lire "Laïcité : le Québec dévoile sa Charte des valeurs".

[1Sic (note du CLR).


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