Revue de presse

Riss : "La justice à monter soi-même" (Charlie Hebdo, 1er juin 22)

Riss, directeur de "Charlie Hebdo". 2 juin 2022

[Les éléments de la revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

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"Le cas Damien Abad pose une question simple. Un homme politique accusé de viol ou d’agression sexuelle doit-il abandonner immédiatement son activité publique  ? Les associations qui luttent contre les violences sexuelles réclament cette mesure, car elle enverrait un message positif, indépendamment de toute considération judiciaire, avec ou sans non-lieu, présomption d’innocence ou pas. En face, on oppose les règles de droit qui devraient bénéficier aussi aux hommes politiques, qui sont, comme tout citoyen, présumés innocents tant qu’ils n’ont pas été condamnés. [...]

« On dit que nous ne sommes pas légitimes pour agir, mais qui peut mieux le faire que des femmes élues, engagées, et parfois elles-mêmes victimes de violences  ? » interroge en ce sens Auriane Dupuy, membre de l’Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique. On pourrait adopter ce raisonnement dans d’autres domaines. Seules les victimes de pédophilie sont compétentes pour juger des pédophiles, et seules des victimes de tortures et d’actes de barbarie sont compétentes pour juger des auteurs de tortures et d’actes de barbarie. On voit ici appliqué à la justice le même raisonnement qu’avec l’indigénisme et le racialisme : seuls les Noirs peuvent comprendre les Noirs, seuls les LGBT peuvent comprendre les LGBT et, inévitablement, seules les femmes peuvent comprendre les femmes. Accusée de ne pas comprendre ce que vivent les femmes victimes de violences sexuelles, la justice devrait se voir retirer le monopole qu’elle a de les juger pour le concéder à des organisations privées plus aptes à le faire. [...]

Dans cette affaire, la droite comme la gauche se retrouvent empêtrées dans leurs contradictions. Entre les grands principes, la morale, les symboles et le militantisme, la justice est noyée sous des injonctions de toutes sortes, et la lutte contre les violences faites aux femmes se retrouve embourbée dans un champ de mines. Tout le monde sait ce qui est injuste, mais personne ne sait vraiment ce qui est juste. Pour paraphraser un célèbre slogan, on pourrait conclure ainsi : justiciers partout, justice nulle part."

Lire "La justice à monter soi-même".


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