Communiqué du CLR

Reconnaissance des diplômes universitaires : une nouvelle attaque contre la laïcité (13 jan. 09)

13 janvier 2009

La question de l’attribution des grades universitaires (la collation des grades) a toujours été considérée comme essentielle dans notre pays. Depuis 1880, le débat est tranché et l’article 15 de la loi du 26 janvier 1984 en réaffirme le principe : « L’Etat a le monopole de la collation des grades et des titres universitaires ». Or, en catimini, un communiqué officiel indique que « Bernard Kouchner, ministre des Affaires étrangères et européennes, et Mgr Dominique Mamberti, secrétaire pour les Relations du Saint-Siège avec les Etats ont signé, le 18 décembre, un accord sur la reconnaissance des grades et diplômes dans l’enseignement supérieur entre la France et le Saint-Siège, dans le cadre de la Convention de Lisbonne du 11 avril 1997 et du processus de Bologne. Cet accord a pour objet de reconnaître la valeur des grades et des diplômes canoniques (théologie, philosophie, droit canonique) ou profanes délivrés par les établissements d’enseignement supérieur catholiques reconnus par le Saint-Siège et de faciliter les différents cursus universitaires ».

Le problème, on le voit, est que l’accord signé par le Quai d’Orsay ne porte pas seulement sur les diplômes canoniques mais aussi sur les diplômes « profanes », c’est-à-dire les diplômes du droit commun. Le journal La Croix du 19 décembre 2008 s’en félicite et considère que cet accord « revient sur une situation d’infériorité de l’enseignement catholique vieille de plus d’un siècle […] Désormais, les titres et grades délivrés par des établissements catholiques, pourvu qu’ils soient reconnus par le Saint-Siège, pourront êtres validés par l’État. C’est une petite révolution ». En effet ! Encore que le mot « révolution » soit ici parfaitement inapproprié et détourné. Il s’agit plutôt d’une restauration conservatrice et cléricale puisqu’il s’agit de revenir à la loi de 1875 sur la liberté de l’enseignement supérieur, votée sous l’Ordre moral et sous la présidence de Mac-Mahon.

Comme le fait remarquer la Conférence des présidents d’université dans une lettre ouverte au président de la République le 5 janvier 2009, « si la reconnaissance des diplômes canoniques délivrés par les institutions catholiques relèvent bien du processus de Bologne, notamment parce qu’elle n’entre pas en concurrence avec les diplômes nationaux, celle des diplômes profanes délivrés par les instituts catholiques s’impose tellement peu que l’Union des établissements d’enseignement supérieur catholique n’était semble-t-il pas informée, selon La Croix du 19 décembre dernier ! Quelle nécessité d’avoir ajouté cette clause provocatrice, qui constitue un précédent inacceptable, et qui ne peut que soulever les protestations de l’ensemble de la communauté universitaire, soucieuse de défendre les valeurs laïques et républicaines ».

Le monopole de la collation des grades universitaires, totalement compatible par ailleurs avec la liberté de l’enseignement, a jusqu’à présent permis que notre pays échappe à un phénomène que l’on connaît aux Etats-Unis où, par exemple, des universités religieuses délivrent des diplômes à forte connotation créationniste, diplômes de même valeur que ceux des universités publiques. La France y échappe, mais pour combien de temps encore ?

CLR, 13 janvier 2009.



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