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« Les terroristes n’ont jamais fréquenté les mosquées... ». Un déni de tous les risques ! (G. Chevrier)

par Guylain Chevrier. 16 septembre 2016

"Mohamed Bajrafil, l’imam d’Ivry-sur-Seine, était invité ce jeudi 15 septembre sur le plateau de « L’émission politique », la nouvelle émission de France 2, pour questionner Nicolas Sarkozy. Il affirme, dans l’échange avec le candidat à la candidature, que les terroristes n’ont jamais fréquenté les mosquées. Voilà la nouvelle fable que défendent certains responsables musulmans aujourd’hui, pour tenter de faire croire que l’islam n’aurait rien à voir dans le mouvement de radicalisation actuel. Une façon d’éluder leurs responsabilités dans un climat d’affirmation identitaire et de revendications religieuses, burkini en tête, qui cherchent l’affrontement avec la société française, ses valeurs, son mode de vie.

Rachid Kassim qui dirige en ce moment les opérations d’attentats en France depuis la Syrie, fréquentait régulièrement la mosquée de sa ville. Si on allait simplement se renseigner, on saurait que les terroristes ont tous peu ou prou été des musulmans pratiquants avant de passer à la radicalisation, la prison n’expliquant pas tout, alors qu’ils viennent de tous les milieux sociaux. Il est aussi connu que la dissimulation fait partie de la stratégie de l’action de ces terroristes, la fameuse « taqiya ». Ce qui ne les rend pas si facilement détectables parmi les fidèles.

Trop de responsables musulmans ne veulent pas se sentir concernés par le fait que les terroristes soient issus d’un milieu pratiquant, ordinaire, celui dans lequel ils exercent leur culte. S’il n’est pas question de faire l’amalgame ici entre musulmans et djihadistes, terroristes, on ne saurait accepter ce déni qui pourrait bien participer de ne pas aider à freiner le mouvement de radicalisation qui s’empare d’un nombre croissant de musulmans. La confusion profite toujours aux puissances obscures. On est passé de 8.000 radicalisés il y a un an, à 15.000 au moins aujourd’hui, selon les chiffres officiels.

« A la mosquée de Saint-Etienne-du-Rouvray, les fidèles ne veulent pas que l’acte terroriste qui a touché la ville soit associé à leur religion. Selon eux, aucun islamiste ne fréquente les lieux. Il y a deux ans (pourtant !), le nom de cette mosquée avait été cité comme l’un des foyers de radicalisation islamiste de la région. Plusieurs jeunes influencés par Maxime Hauchard, un français de la ville voisine d’’Elboeuf, djihadiste présent en Syrie, auraient fréquenté les lieux. Mais le président de la mosquée nie en bloc cette idée. "Jamais, jamais ! Il n’y a pas de jeunes radicalisés. On l’aurait su, s’agace Mohammed Karabila, également « président du Conseil régional du culte musulman (CRCM). « Les mosquées sont clean ici ! » [1] Mais si on se rappelle les nombreux départs de musulmans de la ville de Lunel dans l’Hérault (34), pour se faire djihadistes, ils ont tous fréquentés la mosquée de la ville, dont le président de l’association locale des musulmans d’alors justifiait leur départ et leur haine.

On sait combien l’appel à la violence, au djihad entendu comme la Guerre Sainte, est très présent dans le coran, mais aussi dénié par les mêmes représentants musulmans, ce qui ne peut que faire monter la suspicion et l’inquiétude vis-à-vis de l’islam. C’est d’autant plus criant que l‘heure est grave et que chacun est censé, prendre dans cette situation, toutes ses responsabilités. Ce sont plus de deux cents morts en France victimes de cette barbarie, qui sont en cause, depuis janvier 2015.

On rencontre le même problème au regard de l‘inégalité hommes-femmes, qui est constitutive de la religion musulmane, comme d’ailleurs de toutes les religions. Mais pourquoi éprouve-t-on ce besoin de déni ? Cela ne peut être perçu que comme la volonté d’éviter le débat pour surtout ne rien changer. Il faut lire le verset 34 de la sourate 4 [2] du Coran pour s’en convaincre, où s’expose une domination masculine qui y est légitimée jusqu’à autoriser la violence envers les femmes, quelle que soit la traduction. Bien sûr, cela ne signifie nullement que tous les musulmans appliquent cette forme de domination, mais le fait que le Conseil français du culte musulman (CFCM), dans sa Convention citoyenne (juin 2014) [3], affirme que l’islam pose le principe de l’égalité entre hommes et femmes, est bien un de ces dénis qui empêchent des avancées nécessaires. Quelques musulmans éclairés tentent bien de proposer des changements, comme Ghaleb Bencheikh ou Abdennour Bidar, mais ils restent aujourd’hui malheureusement peu audibles, alors que ce sont les autres que l’on entend.

Tant que les musulmans ne dénonceront pas eux-mêmes, ce qui dans ce texte qu’ils voient comme sacré, s’oppose fondamentalement aux Droits de l’Homme et à la modernité démocratique, à l’autonomie de l’individu, à la liberté, rien ne sera réglé. Il y a dans cette dissimulation et cette volonté de victimisation à laquelle on assiste dès que l’on touche au fond, le ferment d’une confusion qui pousse dans le sens du litige entre les musulmans et la France. A ne pas vouloir dire le vrai, on dénonce une « islamophobie » ambiante dont le but est de faire barrage à toute crique de l’islam, rejoignant l’usage du délit de blasphème. On notera le silence des médias sur une analyse sérieuse du sujet, qui les rend largement complices de cette situation, voire une classe politique qui préfère le plus souvent jouer la précaution ou les enjeux d’un mandat électif. On notera aussi le service que cela rend à un FN qui a entre autres, grâce à cela tragiquement, le vent en poupe !

On fait croire ainsi que le problème viendrait de la France, d’une laïcité mise en procès comme excluante, invitant de nombreux musulmans à se tromper de colère, en soufflant dans le sens de la radicalisation. La surenchère du burkini se multipliant sur les plages de la Côte d’Azur jusque sur les plages de Nice, là où peu avant une centaine de personnes étaient massacrées par un barbare fonçant avec un camion dans la foule, reflète bien ce climat de provocation, et ce qu’il encourage : la haine de la société, de la France. Les promoteurs de la radicalisation qui entendent s’attaquer à notre pays, à sa République, à ses citoyens, ne peuvent que se réjouir de cette façon de leur préparer le terrain, pour endoctriner. C’est un sacré coup de main qui leur est donné par ces musulmans qui en rajoutent, et cherchent à se séparer pour s’affronter avec le reste de la société en tentant d’imposer leurs normes religieuses aux autres, contre leur liberté, y compris celle des musulmans qui veulent vivre librement dans la discrétion leur religion.

Mohamed Bajrafil a accordé à la rédaction de Zaman France un entretien vidéo exclusif en octobre 2015, présenté sous le titre : « J’appelle à un retour au salafisme véritable » [4], extrait de ses propos. La réponse à la dernière question qui lui a été posée ne fait pas retomber l’inquiétude : « Alors Mohamed Bajrafil, comment doit-on entrer dans le XXIe siècle ? Mohamed Bajrafil : « Un des défis du XXIe siècle est de ne pas reproduire des modèles qui ont échoué. La politique est en train d’être dépassée. Les élections n’intéressent plus personne. II y a peut-être une autre façon de faire société à laquelle réfléchir ». De quoi nourrir les craintes bien fondées de ceux qui voient, derrière le déni du lien entre communautarisme et radicalisation, l’avènement d’un islam politique de tous les dangers, qui entend à tout prix ne pas dire son nom."

Guylain Chevrier

[2Le Saint Coran, Albouraq, 2008, page 100.

[33- Convention Citoyenne des Musulmans de France pour le vivre‐ensemble. Article 3. file :///C :/Users/Acer/Downloads/convention_citoyenne_des_musulmans_de_france_pour_le_vivre_ensemble.pdf

[4Mohamed Bajrafil, « J’appelle à un retour au salafisme véritable ». https://www.zamanfrance.fr/article/mohamed-bajrafil-jappelle-a-retour-salafisme-veritable-17941.html


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